Walter Schäfer

"Corporibus caecis igitur natura gerit res"

Lukrez, De Rerum Natura 1/329

Galileo Galilei, Son Conflit Avec Les Theologiens.

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Pourquoi a-t-il abjure?

AVANTPROPOS

 

Le soutitre "UN BILAN" pourrait paraître ambitieux. L'aspect "bilan" se limite dans le contexte de Galilei au conflit entre les vérités absolues des théologiens d'une part et la vérité probable, mais assez fiable, des sciences physiques. Plus particulièrement, l'exposé fait passer en revue l'évolution factuelle du cas Galilei. Il n'y a rien de révolutionnaire, mais tout en regardant de près les documents-clefs mêmes, il y a moyen de voire la factualité historique de manière plus nette que beaucoup de prose, notamment non-italienne, ne le permet. 

Afin de juger le cas de Galilei valablement, il faut du latin et il faut de l'italien. Beaucoup de prose a été ecrit sur Galilei où les auteurs ne connaissaient ni l'un ni l'autre. C'est pourquoi qu'en regardant les sources latines ou italiennes, on arrive à des surprises d'informations encore aujourd'hui.

Sources: Les oeuvres de Copernicus, de Galilei (notamment ses oeuvres complètes a la bibliothèque de lafaculté des belles lettres a l'université de Louvain et à la Bibliothèque royale de Bruxelles, la base gallica de la Bibliothèque nationale de France), de Kepler, la biographie de Copernicus par Prowe, une documentation du Vatican sur le procès de Galilei (PAGANO,1984).

 

Déjà comme élève au secondaire la question me fascinait: "Pourquoi Galilei a-t-il abjuré?"

 

Ayant choisi très tôt les sciences physiques pour mes intentions professionelles, et trouvant cette option fondamentalement sérieuse et responsable, je me révoltait contre la vue de Bert Brecht sur les scientifiques, telle que personnifiée par son "Galilei" dans le drame "La Vie de Galileo Galilei":

 

Réécrit apres les bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki avec un bilan de 300 000 morts, et en suivant les rails de l'école de Frankfurt (Horkheimer: 'La critique de la raison instrumentale', 'La dialectique des lumières'/ Eclipse of reason/ Dialektik der Aufklaerung), Brecht, de par son drame, fait de Galilei un criminel,qui n'emploie pas son savoir pour le bien-être de l'humanité.

 

Galilei/ Brecht: 'Je n'aurais pas dû abjurer. Si je ne l'avais pas fait, les scientifiques auraient pu développer quelque chose comme le serment d'Hippocrate et n'utiliser leur savoir que pour le bien-être de l'humanité. Maintenant on ne peut s'attendre qu'a une génération de nains inventifs, qui peuvent être loués pour faire n'importe quoi!"

 

Je m'oppose catégoriquement à cette notion de nains inventifs irresponsables, de par mon expérience professionnelle, humaine et sociale. Horkheimer, en stipulant que les lumieres sont totalitaires (Aufklärung ist totalitär), rapproche les sciences au service de la Aufklärung aux idéologies de Hitler ou de Stalin (Henry Michel: La Barbarie). D'ailleurs l'oeuvre de Horkheimer déborde de totalisateurs (indicateurs d'idéologie / de vérités absolues), tout en se déclarant lui-même au service de la critique d'idéologie. Il n'élimine pas les vérités absolues, il y ajoute d'autres. Et surtout: On passe en silence la raison instrumentale produisant des inventions dans les camps des philosophes, des théologues et des sociologues, sans que soit assumée la responsabilité pour les conséquences de ces inventions? Où Brecht cible-t-il les inventions de Stalin et la responsabilité pour leurs conséquences?

 

Certes il y a des nains inventifs irresponsables dans la race humaine, mais cela ne se limite pas a une seule faculté: les théologues, les sociologues devraient être invités également a prendre la responsabilité pour les conséquences de leurs inventions (theology assessment, sociology assessment):

 

1. Les indulgences (éthique des économes?), invention du vatican

2. Les procès contre les sorciéres (bulle du Vatican: un millions de femmes allemandes brulées vives comme sorcières sur les bûchers entre 1500 et 1780,pas un seul sorcier!)

2. L'holocaust des croates catholiques vers les serbes orthodoxes: Ou bien baptême catholique ou une balledans la tête entre 1941-43. Selon des sources d'informations américaines (citées par Le Monde ) 750 000 morts. Le Vatican protège et cache les chefs du mouvement (Pavelic / Draganovic: BBC)

 

 

BILAN PERSONNEL

 

En théologie, philosophie, sociologie, astrologie et autres "sciences limitrophes" (Grenzwissenschaften), la compréhension des faits de l'univers est d'une pauvreté dangereuse (exemple flagrant: le cas de Galilei), et les vérités absolues poussent comme des champignons. 

 

Pourquoi Galilei a-t-il abjuré? Voyons les sources: Ce n'est pas la formule du marxisme tardif, irresponsable et radoteur de Bert Brecht : "Celui qui ne connaît pas la vérité n'est qu'un imbécile. Celui qui la connaît et l"appelle un mensonge est un criminel ". 

Brecht ignorait complètement la vérité autour de Galilei. Selon ses propres critères : Brecht n'était qu'un imbécile. 

 

Le Christ est né avant le Christ. Pour des raisons scientifiques aussi bien que pour des raisons théologiques il y a eu un désordre assez important dans le calendrier, depuis la naissance du Christ pour bien un millénaire et demi. 

 

L'habitude de compter les dates des évènements historiques, c'est à dire avant et après le Chrixst, comme nous l'avons appris à l'école, était devenue tradition depuis le début du 7e siècle (env. 607). Un moine Dionysius à Rome, avait mal calculé (environ 526-530) l'année de naissance du Christ: il est plus probable qu'il fut né l'an -6. Théoriquement nous devrions déjà être dans le troisième millénaire. 

 

Au concile de Nikaía (325) on avait trouvé une règle pour déterminer la datedes fêtes réligieuses, notemment Pâques (premier dimanche après la première pleine lune après l'équinox de printemps). Mais assez tôt on s'était rendu compte que cette règle exigeait des corrections, corrections qui n'étaient pas autorisées par l'église, car l'autorité des pères de l'église aurait pu être mise en question. Il fallait un millénaire au Vatican avant d'autoriser des travaux aboutissant à la réforme grégorienne du calendrier (1582:Gregor XIII/ le 15 octobre 1582 suivait immédiatement le 4 octobre / précision: un jour sur 3000 années; dans le calendrier julien: un jour sur 133 1/3 années) et voilà Nicolaus Copernicus au travail, sous mandat de l'église catholique, afin de déterminer avec plus de précision la longueur de l'année, ceci d'ailleurs sous la tutelle d'un homme de nos latitudes, Pol van Middelburg, qui menait la direction de l'organisation de ces travaux; Pol van Middelburg avait fait ses études à Louvain, était ensuite canonicus (chanoine) à Middelburg, puis professeur à Padova, secrétaire du Duc d'Urbino et évêque de Fossombrone. 

 

Dans la lettre de dédicace de son oeuvre De Revolutionibus au Pape Paul III, Copernicus mentionne Paul van Middelburg, et il souligne que sa nouvelle approche pythagorienne amène justement plus de précision dans le calcul des éphémérides. 

 

Ci-après vous trouverez ce document copernicain qui est très intéressant dans notre contexte pour plusieures raisons:

• Copernicus travaille sous un mandat de l'église pratiquement, et ses travaux aboutissent à et portent la réforme grégorienne du calendrier (ensemble avec les "tabulae Prutenicae" de Erasmus Reinhold, basées aussi sur Copernicus);

• Il argumente que d'autres, avant lui, avaient déjà développé le concept du système héliocentrique (Hiketas / Philolaos), et pourquoi pas examiner de plus près si ce système héliocentrique apporte quelque chose afin d'améliorer la compréhension des faits de l'univers et la déterminaison plus précise de la longueur de l'année;

• Copernicus fait son compte avec ceux, en anticipation, qui vont dénigrer et condamner son travail, sans avoir la capacité de comprendre ni la théorie ni les faits.


Il les appelle mataiológoi, des gens qui parlent sans savoir de quoi ils parlent, des sots radoteurs (Dummschwätzer / scatterbrains) et de sycophantae / des calomniateurs. D'ailleurs, en Grec moderne on utilise encore un verbe mataiologW et un substantifmataiología pour exprimer la même carence de compréhension, "parler vide". Le nombre de Mataiologues est impressionnant. Martin Luther n'est pas le seul ("Je préfère le ne pas savoir au savoir"/ Ich will lieber nicht wissen als wissen), il faut y ajouter de générations de Papes et de cardinaux. 

Copernicus prévoit donc avec précision le cas de Galilei:

 

Il y aura des radoteurs qui, ignorant tout des mathématiques, se permettront néanmoins de juger de ces choses et, à cause de quelque passage (singulier!) de l'Ecriture, malignement détourné de son sens, oseront blâmer et attaquer son ouvrage. Copernicus demande la protec- tion et le jugement du Pape adressé afin de le protéger contre les morsures de ces sycophantes / calomniateurs. 

 

Dans la terminologie de Copernicus même et trois quarts de siècle plus tard, on trouvera des sots radoteurs et des sycophantes au plus haut niveau du Vatican et ailleurs. 

 

Voici le texte de Copernicus en français:

 

 

AU TRÈS SAINT PÈRE LE PAPE PAUL III PRÉFACE DE NICOLAS COPERNIC AUX LIVRES DES RÉVOLUTIONS

 

Je puis fort bien m'imaginer, Très Saint Père, que, dès que certaines gens sauront que, dans ces livres que j'ai écrits sur les révolutions des sphères du monde, j'attribue à la terre certains mouvements, ils clameront qu'il faut tout de suite nous condamner, moi et cette mienne opinion. 

 

Or, les miens ne me plaisent pas au point que je ne tienne pas compte du jugement des autres. Et bien que je sache que les pensées du philosophe ne sont pas soumises au jugement de la foule, parce que sa tâche est de rechercher la vérité en toutes choses, dans la mesure où Dieu le permet à la raison humaine, j'estime néanmoins que l'on doit fuir les opinions entièrement contraires à la justice et à la vérité. C'est pourquoi, lorsque je me représentais à moimême combien absurde vont estimer cette akroama ceux qui savent être confirmée par le jugement des siècles l'opinion que la terre est immobile au milieu du ciel comme son centre, si par contre j'affirme que la terre se meut je me demandais longuement si je devais faire paraître mes commentaires, écrits pour la démonstration de son mouvement; ou, au contraire, s'il n'était pas mieux de suivre l'exemple des Pythagoriciens et de certains autres, qui - ainsi que le témoigne l'épitre de Lysis à Hipparque - avaient l'habitude de ne transmettre les mystères de la philosophie qu'à leurs amis et à leurs proches, et ce non par écrit, mais oralement seulement. 

Et il me semble qu'ils le faisaient non point, ainsi que certains le pensent, à cause d'une certaine jalousie concernant les doctrines à communiquer, mais afin que des choses très belles, étudiées avec beaucoup de zéle par de très grands hommes, ne soient méprisées par ceux à qui il répugne de consacrer quelque travail sérieux aux lettres - sinon à celles qui rapportent -, ou encore par ceux qui, même si par l'exemple et les exhortations des autres ils étaient poussés à l'étude libérale de la philosophie, néanmoins, à cause de la stupidité de leur esprit, se trouvent être parmi les philosophes comme des frelons parmi les abeilles. Comme donc j'examinais ceci avec moi-même, il s'en fallut de peu que, de crainte du mépris pour la nouveauté et l'absurdité de mon opinion, je ne supprimasse tout à fait l'oeuvre déjà achevée.

 

Mes amis cependant m'en détournèrent, moi qui longtemps hésitai et même leur résistai. Et parmi eux le premier fut Nicolas Schonberg, cardinal de Capoue, célèbre dans tous les domaines du savoir; ensuite Tiedeman Giese, évêque de Culm, qui m'aimait beaucoup, homme plein de zèle pour les choses sacrées et toutes les bonnes sciences. Celui-ci, notamment, m'avait fréquemment exhorté et même m'avait poussé par des reproches maintes fois exprimés, à éditer ce livre et à faire voir le jour à l'oeuvre qui était demeurée cachée chez moi non pas neuf ans seulement, mais déjà bien près de quatre fois neuf ans. 

 

Ce que me demandèrent également plusieurs autres personnes éminentes et fort savantes, m'exhortant de ne plus me refuser - à cause des craintes que je concevais - de faire paraître mon oeuvre pour le plus grand profit de tous ceux qui s'occupent de mathématiques. Et peut-étre, aussi absurde que ma théorie du mouvement de la terre ne paraisse aujourd'hui à la plupart, elle n'en provoquera que d'autant plus d'admiration et de reconnaissance lorsque, par suite de la publication de mes commentaires, ils verront les nuages de l'absurdité dissipés par les plus claires démonstrations. C'est par de telles persuasions et par de tels espoirs que je fus amené à permettre enfin à mes amis de faire l'édition de mon oeuvre qu'ils m'avaient longtemps réclamée. 

 

Mais Ta Sainteté sera peut-étre moins étonnée que j'ose faire paraître ces miennes méditations, après avoir pris tant de peine à les élaborer que je ne crains pas de confier aux lettres mes idées sur le mouvement de la terre, que désireuse d'apprendre de moi comment il m'est venu à l'esprit d'oser imaginer - contrairement à l'opinion reçue des mathématiciens et presqu'à l'encontre du bon sens un certain mouvement de la terre. C'est pourquoi je ne veux pas cacher à Ta Sainteté que nulle autre cause ne me poussa à rechercher une autre façon de déduire les mouvements des sphères du monde que le fait d'avoir compris que les mathématiciens ne sont pas d'accord avec eux-mêmes dans leurs recherches. Car, premièrement, ils sont tellement incertains des mouvements du soleil et de la lune qu'ils ne peuvent ni déduire ni observer la grandeur constante de l'année entière. Ensuite, en établissant les mouvements de ces [astres], ainsi que des autres cinq astres errants, ils ne se servent ni des mêmes principes et des mêmes assomptions, ni des mêmes démonstrations des révolutions et mouvements apparents. Les uns, notamment, ne font usage que de [sphères] homocentriques, les autres d'excentriques et d'épicycles, par quels moyens cependant ils n'atteignent pas entièrement ce qu'ils cherchent. En effet, ceux qui s'en tiennent aux [sphères] homocentriques, quoiqu'ils aient démontré pouvoir composer à leur aide plusieurs et divers mouvements, n'ont pu cependant rien établir de certain expliquant entièrement les phénomènes. Quant à ceux qui imaginèrent des excentriques, bien qu'avec leur aide ils semblent, en grande partie, avoir pu déduire et calculer exactement les mouvements apparents, ils ont cependant admis beaucoup [de choses] qui semblent s'opposer aux principes premiers concernant l'uniformité des mouvements. Enfin en ce qui concerne la chose principale, c'est-à-dire la forme du monde et la symétrie exacte de ses parties, ils ne purent ni la trouver, ni la reconstituer. Et l'on peut comparer leur oeuvre à celle d'un homme qui, ayant rapporté de divers lieux des mains, des pieds, une tête et d'autres membres - très beaux en eux-mèmes mais non point formés en fonction d'un seul corps et ne se correspondant aucunement -, les réunirait pour en former un monstre plutôt qu'un homme. C'est que, dans le processus de démonstration que l'on appelle [ti6o8ov, ils se trouvent soit avoir omis quelque chose de nécessaire, soit avoir admis quelque chose d'étranger et n'appartenant aucunement à la réalité. Ce qui ne leur serait pas arrivé s'ils avaient suivi des principes certains. Car si les hypothèses qu'ils avaient admises n'étaient pas fallacieuses, tout ce qui en serait déduit aurait, sans aucun doute, été vérifié. Et si peut-être ce que je dis là est obscur, cela deviendra cependant plus clair en son lieu. 

 

Or, comme j'avais longuement médité avec moimême sur cette incertitude de l'enseignement des mathématiciens concernant la composition des mouvements des sphères du monde, je commençai à être ennuyé par le fait que les philosophes, qui avec tant de soin avaient étudié les choses les plus minimes concernant ce monde, ne possédaient aucune explication certaine des mouvements de la machine de l'Univers qui avait été construit pour nous par le meilleur et le plus parfait des artistes. C'est pourquoi je pris la peine de lire les livres de tous les philosophes que je pus obtenir, pour rechercher si quelqu'un d'eux n'avait jamais pensé que les mouvements des sphères du monde soient autres que ne l'admettent ceux qui enseignèrent les mathématiques dans les écoles. Et je trouvai d'abord chez Cicéron que Nicétas pensait que la terre se mouvait. Plus tard je retrouvai aussi chez Plutarque que quelques autres ont également eu cette opinion. Et pour qu'ils soient patents à tous je transcris ici ses mots. 

 

"D'autres cependant pensent que la terre se meut; ainsiPhilolaos le Pythagoricien dit qu' elle se meut autour du feu en un cercle oblique, de même que le soleil et la lune. Héraclide du Pont et Ecphantos le Pythagoricien ne donnent pas, il est vrai, à la terre, un mouvement de translation, mais à la façon d'une roue, limitée entre le coucher et le lever, la font se mouvoir autour de son propre centre."

 

Partant de là, j'ai commencé, moi aussi, à penser à la mobilité de la terre. Et quoique l'opinion semblait absurde, cependant, puis donc que je savais qu'à d'autres avant moi fut accordée la liberté d'imaginer n'importe quels cercles afin d'en déduire les phénomènes des astres, je pensai qu'il me serait également permis de faire l'expérience de rechercher si, en admettant quelque mouvement de la terre, on ne pouvait trouver une théorie plus solide des révolutions des orbes célestes que ne l'étaient celles de ceux-ci. 

 

C'est ainsi que, étant posés les mouvements que plus bas dans mon oeuvre j'attribue à la terre, je trouvai enfin par de longues et nombreuses observations que, si les mouvements des autres astres errants étaient rapportés au mouvement[orbital] de la terre et que celui-ci était pris pour base de la révolution de chacun des astres, non seulement en découlaient les mouvements apparents de ceux-ci, mais encore l'ordre et les dimensions de tous les astres et orbes, et qu'il se trouvait au ciel lui-mème une connexion telle que dans aucune de ses parties on ne pouvait changer quoi que ce soit sans qu'il s'ensuive une confusion de toutes les autres et de l'Univers tout entier. 

 

C'est pourquoi aussi dans la composition de mon ouvrage j'ai adopté l'ordre suivant : dans le premier livre je décris toutes les positions des orbes, ainsi que les mouvements que j'attribue à la terre, afin que ce livre contienne, pour ainsi dire, la constitution générale de l'Univers. Après quoi,'dans les autres livres je rapporte les mouvements des autres astres et de tous les orbes à la mobilité de la terre, afin que, de là, on puisse reconnaître dans quelle mesure les mouvements des autres astres, ainsi que les apparences, peuvent être sauvés si on les rapporte au mouvement de la terre. Et je ne doute pas que les mathématiciens ingénieux et savants ne s'accordent avec moi si seulement - ainsi que la philosophie l'exige en premier lieu - ils veulent étudier et examiner - non pas superficiellement mais d'une façon approfondie, - ce que, dans mon ouvrage, j'apporte à la démonstration de ces choses. Et pour que les savants et les ignorants voient pareillement que je ne veux éviter aucunement le jugement de personne, j'ai voulu dédier ces miennes recherches à Ta Sainteté plutôt qu'à tout autre, parce que, même dans ce coin éloigné de la terre où je vis, tu es considéré comme la personne la plus éminente, autant dans l'ordre de la dignité que pour l'amour des lettres et même des mathématiques, afin que, par ton autorité et jugement tu puisses réprimer les morsures des calomniateurs; quoiqu'il soit bien connu qu'il n'y a pas de remède contre la morsure des sycophantes. 

 

Si cependant il se trouvait des mataiológoi (sots radoteurs) qui, bien qu'ignorant tout des mathématiques, se permettaient néanmoins de juger de ces choses et, à cause de quelque passage de l'écriture, malignement détourné de son sens, osaient blâmer et attaquer mon ouvrage ; de ceux-là je ne me soucie aucunement, et ceci jusqu'à mépriser leur jugement comme téméraire (imprudent). Car on sait bien que Lactance, écrivain autrement célèbre, mais faible mathématicien, a parlé d'une façon parfaitement puérile de la forme de la terre, en se moquant de ceux qui ont découvert que la terre avait la forme d'une sphère. Les doctes ne s'étonneront donc pas si de tels gens se moquaient de nous. Les choses mathématiques s'écrivent pour les mathématiciens, auxquels, si mon opinion ne me trompe, ces miens travaux paraîtront contribuer à la gloire de la République Ecclésiastique dont Ta Sainteté occupe aujourd'hui le principal. En effet, il n'y a pas longtemps, sous Léon X, lorsqu'au Concile de Latran fut débattue la question de la réforme du calendrier ecclésiastique, elle resta sans solution uniquement parce que les grandeurs de l'année et des mois et les mouvements du soleil et de la lune furent estimés insuffisamment bien mesurés. Et, certes, dès ce temps, j'ai eu à coeur d'étudier ces choses d'une façon plus exacte, encouragé par le très célèbre Paul, évêque de Fossombronequi avait alors présidé à ces délibérations. Quant à ce que j'ai accompli dans cet ordre d'études je le soumets au jugement de Ta Sainteté, ainsi qu'à celui de tous les autres savants mathématiciens. Et pour que je ne ne paraisse pas à Ta Sainteté promettre sur l'utilité de mon ouvrage plus que je ne pourrai tenir, je passe maintenant à cette oeuvre même.

 

Donc pour la réforme du calendrier (1582), toujours en application aujourd'hui avec une très bonne précision, l'église s'appuye massivement, directement et indirectement, sur Copernicus. Elle lui fait confiance, elle n'a aucun doute. Mais elle le mettra à l'index en 1616, tout en ne touchant pas à la réforme grégorienne du calendrier: schizophrénie culturelle. 

 

Considérons ensuite un échange de lettres entre Galilei et Kepler de l'an 1597. Ils sont tous les deux heureux d'avoir trouvé, dans l'autre, un ami de la vérité, il se confessent tous les deux copernicains. Kepler: Tous ceux qui calculent aujourd'hui des éphémérides, ils suivent tous Copernicus. 

 

Deux années plus tard, Kepler va rejoindre Tycho BRAHE à Prague et après la mort du dernier, basé sur les observations de mars, il se lance dans des calculs qui le mènent à la publication de ses deux premières lois sur le mouvement des planètes en 1609, bien avant le conflit de Galilei avec la théologie catholique. En 1618 suit la 3e loi de Kepler. Les orbits des planètes sont des ellipses. Il y a encore quelques échanges entre les deux, mais dans l'ensemble c'est peu. Certes, il y a le clivage réformé / catholique entre eux, Kepler avait bien plus de soucis d'existence que Galilei et à partir de 1618, il y a eu la guerre de trente ans en Europe centrale, mais malgré tout, les deux lettres qui suivent ci-après, témoignent assez que les deux jeunes s'entendent très bien et s'estiment beaucoup. Retenons ici que Kepler fut mis à l'index en 1619, Epitomes Astronomiae Copernicanae / Précis d'astronomie copernicaine.

 

Dans une lettre a Micanzio (novembre 1634) Galilei mentionne les différences entre lui et Kepler. Cette lettre est reprise également dans ce documentaire. Elle reflète surtout l'avis de Galilei que les deux travaillent sur des sujets très différents. Il y a relativement peu de domaines qui se recoupent, comme l'astronomie.

 

 

A JOHANN KEPLER, A GRAZ, PADOUE, 4 AOûT 1597 -

 

Très savant homme,

Ton livre, que Paul Amberger m'a fait parvenir, je l'ai reçu il y a non pas quelques jours, mais quelques heures; et comme le même Paul me parlait de son retour en Allemagne, j'ai pensé que ce serait faire preuve de beaucoup d'ingratitude que de ne pas t'écrire pour te remercier de ce présent. Je te rends donc grâces, et discutant plus que tu as bien voulu, par ce signe,m'appeler à ton amitié.

 

De ton livre, je n'ai encore lu que la préface; elle m'a permis cependant d'entrevoir quelque chose de ton intention, et rien, certes, ne m'est plus agréable que de trouver, dans la recherche du vrai, un allié tel que toi, et à tel point ami de la vérité. Il est pitoyable en effet que soient si rares ceux qui s'attachent à la vérité, et ne s'engagent pas dans les voies d'une philosophie perverse. Mais comme ce n'est pas ici le lieu de déplorer les misères de notre siècle, mais bien plutôt de me féliciter avec toi des remarquables découvertes qui ont été faites en confirmation de la vérité, tout ce que j'ai à dire, c'est que je me promets de lire entièrement ton ouvrage d'un coeur apaisé, certain que je suis d'y trouver de très belles choses je le ferai avec d'autant plus de joie que, depuis plusieurs années déjà je me suis converti à la doctrine de Copernic, grâce à laquelle j'ai découvert les causes d'un grand nombre d'effets naturels dont il est hors de doute que l'hypothèse commune ne peut rendre compte. J'ai écrit sur cette matière bien des considérations, des raisonnements et des réfutations que jusqu'à présent je n'ai pas osé publier, épouvanté par le sort de Copernic lui-même, notre maître, qui, s'il s'est assuré une gloire immortelle auprès de quelques-uns, s'est exposé d'autre part (si grand est le nombre des sots) à la dérision et au mépris de beaucoup d'autres. Sans doute m'enhardirais-je à produire au grand jour mes réflexions s'il y avait beaucoup d'hommes comme toi, mais comme il en est peu, j'aime mieux remettre à plus tard pareille entreprise. 

 

Pressé par le temps et par le désir de lire ton livre, je termine cette lettre en me déclarant ton très affectionné et en toutes choses très dévoué serviteur. Garde-toi en santé, et qu'il ne te déplaise pas de m'envoyer de tes nouvelles : elles seront les bienvenues. 

 

De Padoue, la veille des nones d'août 1597. 

Très attaché à ton honneur et à ton nom,

 

Galileus Galileus

Mathématicien de I'Académie de Padoue. 

 

 

GÌOVANNI KEPLER A GALILEO IN PADOVA. GRAZ, 13 OTTOBRE 1597 -

 

Literas tuas, vir humanissime, 4 augusti scriptas, 1 septembris accepi, quae quidem gemino me affecere gaudio: primum, propter amicitiam tecum Italo initam; post, propter consensum nostrum in cosmographia Copernicana. Cum igitur in calce epistolae humaniter me ad crebras, epistolas invitasses, neque mihi sponte mea stimuli ad hoc deessent, facere aliter non potui, quin per hunc praesentem nobilem iuvenem ad te scriberem. Existimo namque te ab eo tempore, si ocium tibi fuit, libellum meum penitius cognovisse; inde cupido me vehemens incessit censurae tuae percipiendae : sic enim soleo ad quoscunque scribo, iudicia de meis incorrupta efflagitare; et mihi credas velim, malo unius cordati censuram, quamvisacrem, quam totius vulgi inconsideratos applausus. Utinam vero tibi, tali intelligentia praedito, aliud propositum esset!Nam etsi sapienter tu et occulte, proposito exemplari tuae personae, mones, cedendum universali ignorantiae, nec sese temere ingerendum vel opponendum vulgi doctorum furoribus, qua in re Platonem et Pythagoram, nostros genuinos magistros,sequeris, tamen cum hoc saeculo, primum a Copernico, deinde a compluribus, et doctissimo quoque mathematicorum, immanis operis initium sit factum, neque hoc iam porro novum sit, terram movere; praestiterit fortasse, communibus suffragiis semel impu1sum hunc currum continenter ad metam rapere, ut, quia rationum pondera vulgus minus librat, authoritatibus illud magis magisque obruere incipiamus, si forte per fraudem ipsum in cognitionem veritatis perducere queamus: qua ratione simul laborantes tot iniquis iudiciis socios adiutares, dum illi vel solatium caperent ex tuo consensu, vel praesidium ab authoritate. Non enim tui solum Itali sunt, qui se moveri, nisi sentiant, credere non possuunt ; sed etiam nos hic in Germania non optimam dogmate isto gratiam inimus. Verum sunt rationes, quibus nos contra difficultates muniamus. 

 

Primum, ab illa ingenti hominummultitudine separatus sum, nec uno actu tot clamorum strepitum haurio. Deinde, qui mihi sunt proximi, vulgus hominun est, qui cum haec abstrusa, ut aiunt, non capiant, mirantur tamen, nec, credere velint an non, unquam secum ipsi cogitant. Docti mediocriter, quo sunt prudentiores, hoc cautius sese immiscent hisce mathematicorum litibus; quinimo fascinari possunt, quod expertus loquor, authoritate matheseos peritorum: ut cum audiunt, quas iam habeamus ephemerides, ex Copernici hypothesibus extructas; quicunque hodie scribant ephemerides, Copernicumomnes sequi; et cum ab ipsis postulatur ut concedant quod non nisi in mathesi institutìs demonstrari possit, phaenomena sine motu terrae consistere non posseNam etsi haec postulata vel pronunciata non sunt, sunt tamen a non mathematicis concedenda ; cumque sint vera, cur non pro irrefutabilibus obtruderentur ? Restant igitur soli mathematici, quibuscum maiori labore agitur. Ii, cum nomen idem habeant, non concedunt postulata sine demonstratione : quorum quo imperitior quisque, hoc plus negocii facessit. Veruntamen et hic remedium adhiberi potest: solitudo. Est in quolibet loco mathematicus unus; id ubi est, optimum est. Tum si habet alibi locorum opinionis socium, literas ab ipso impetret; qua ratione, monstratis literis (quorsum etiamn mihi tuae prosunt), opinionem hanc in animis doctorum excitare potest, quasi omnes ubique professores mathematum consentirent. Verum quid fraude opus est ? Confide, Galilaee, et progredere. Si bene coniecto, pauci de praecipuis Europae mathematicis a nobis secedere volent: tantavis est veritatis. Si tibi Italia minus est idonea ad publicationem, et si aliqua habiturus es impedimenta, forsan Germania nobis hanc libertatem concedet. Sed de his satis. Tu saltem scriptis mihi communica privatim, si publice non placet, si quid in Copernici commodum invenisti. 

Nunc abs te placet aliquid observationum postulare: scilicet mihi, qui instrumentis careo, confugiendum est ad alios. Habes quadrantem in quo possis notare singula scrupula prima et quadrantes primorum ? Observa igitur, circa 19 decembris futurum, altitudinem eductionis caudae in Ursa maximam et minimam eadem. Sic circa 26 decembris observa similiter utramque stellae polaris altitudinem. Primam stellam observa etiam circa 19 martii anni 98, altitudine nocturna, hora 12 ; alteram, circa 28 septembris, etiam hora 12. Nam si, quod opto, differentia quaedam inter binas observationes intercedet unius atque alterius scrupuli, magis si decem aut quindecim, rei per totam astronomiam latissime diffusae argumentum erit; sin autem nihil plane differentiae deprehendemus, palmam tamen demonstrati nobilissimi problematis, hactenus a nemine affectatam, communiter reportabimus. Sapienti sat dictum. 

 

Mitto autem duo insuper exemplaria, quia Hambergerus mihi dixerat, te plura desiderare. Cuicunque miseris, ille literis de libello scriptis mercedem solverit. Vale, Clarissime vir, et per epistolam longissimam mutuum ihi repende. 

 

Dans sa réponse à Galilei, Kepler se réjouit du début de son amitié avec Galilei, de leur consensus à l'égard de la cosmographie copernicienne. Il constate que quiconque écrit des éphémérides, ils suivent tous Copernicus. Mais il y a beaucoup de personnes qui ne croient que ce qu'ils voient. Les mathématiciens, par contre, "non concedunt postulata sine demonstratione", pas de postulat sans démonstration de preuve. Il encourage Galilei de continuer. Si l'approche est bien conçue, peu des premiers mathématiciens européens vont se séparer d'eux. Tanta vis est veritatis. La vérité a tant de force. Si l'Italie de Galilei semble moins inclinée à la publication, peut-être la Germania de Kepler pourrait offrir cette liberté. 

 

 

492 [30181. GALILEO A FULGENZIO MICANZIO IN VENEZIA. ARCETRÌ, 19 NOVEMBRE 1634 -

 

Devo rispondere alle due sue ultime, non avendo io potuto rispondere alla prima di esse so non molto succintamente ma il male è che poco piú potrò fare al presente, avendomi tolto buona parte del tempo il dover ricopiare il resto della postilla, che con la presente gli mando. 

 

A quello che mi dice nella prima, di voler far ristampare il trattatello De insidentibus e forse il Saggiatore, quanto a questo secondo, quando si risolvesse, saria forse bene aggiugnervi le postille che ho fatte alla risposta del medesimo Sarsi al Saggiatore; e sì potrebbe figurar che allo stampatore fusse dato per le mani un libro di detto Sarsi postillato con risposte alle obbiezioni che ci fa al Saggiatore. La Paternità Vostra ci penserà un poco, ed io ancora. Il Discorso del Sig. Guiducciche mi domanda, dovrà averlo ricevuto ché con l'ordinario passato gliel inviai. La nota del nostro quondam comun padre e maestropoteva esser circa la condensazione e rarefazione, come punti da me piú tosto stimati difficilissimi che resoluti, non vi avendo in quei tempi altro che difficoltà; ma ben poi circa diciotto' anni sono, ritrovandomi alla villa con il Salviati del Dialogo,mi,cadde nella mente una mattina, mentre eramo a messa, un pensiero, nel quale poi più profondamente internandomi, mi vi son venuto confermando, e a me è parso poi sempre ammirando come permodo stupendo di operar della natura, secondo il qual modo (o credo in nessun altro) si possa distrarre e rarefare una sustanza in immensosenza ammettere in essa veruno spazìo vacuo, e all'incontro in immmenso condensarla senza alcuna penetrazione di corpi: pensiero, credami, assai peregrino, il quale insieme con moltissime altre novità spero che ella vedra' nelle opere che mi restano da mandar fuora, le quali penso di ridurre al nettoin questa vernata per mandarle poi alla P. V. , acciò ne faccia il suo volere. Al virtuoso che alla dice potrà con occasione fare intendere che io ho stimato sempre il Keplero per ingegno libero (e forse troppo) e sottile, ma che il mio filosofare è diversissimo dal suo, e che può essere che scrivendo delle medesime materie, solamente pero circa i movimenti celesti, abbiamo talvolta incontrato in qualche concetto simile, se ben pochi, onde abbiamo assegnato di alcuno effetto vero la medesima ragion vera; ma questo non si verificherà di uno per cento dei miei pensieri. 

 

Quanto all'ultima sua, piena di affetto troppo appassionato, non ho che dirgli altro: il trattato del moto, tutto nuovo, sta all'ordine; ma il mio cervello inquieto non può restar d'andar mulinando, e con gran dispendio di tempo, perché quel pensiero che ultimo mi sovviene circa qualche novità mi fa buttare a monte tutti i trovati precedenti. Non voglio voltar carta, perché si fa sera; gli fo reverenza e confermo servitore. 

 

"J'ai toujours estimé Kepler pour son esprit libre (peut être trop libre) et fin, mais que ma philosophie est très diverse de la sienne, et il se peut qu'en écrivant traitant des mêmes sujets, mais seulement des mouvements célestes, nous avons rencontré souvent dans des conceptes similaires, mais peu nombreux, une coincidence de vues. Mais ceci ne peut se dire que pour un parmi cent de mes pensées."

 

1609/1610: Galilei dressent son "canon" (cannone/occhiale) sur le ciel étoilé et fait grande sensation avec ses découvertes. Il publie le "Sidereus nuntius", dont Kepler prepare une traduction allemande, ce qui assure à Galilei une publicité fulgurante au nord des Alpes. 

Encore aujourd'hui on peut voir, au musé de la science à Florence (derrière les Uffices), deux des lunettes de Galilei, agrandissement 14 et 20 fois. Les objectifs n'ont qu'un diametre effectif de 15 mm, les instruments ne sont donc pas très lumineux (détail important pour l'observation d'objets peu lumineux, comme les comètes, et à l'origine d'un conflit important et acharné entre Galilei et les Jésuites du Collegio romano, dont nous allons parler un peu plus loin). Selon un article récent dans "Nature", ces instruments étaient remarquables pour l'époque. 

 

Aux plus hauts niveaux, les observations de Galilei sont discutées, au Vatican aussi bien qu'à la cour de Florence. 

 

C'est ainsi qu'en 1611, le cardinal Bellarmino (espagnol, jésuite, il avait livré Giordano Bruno, copernicain, au bûcher, stipulait un univers infini, mais surtout, avait appelé les fratri asini, les frères théologues sont des ânes, ce qu'il devait payer cher), consulta ses experts scientifiques (les mathématiciens) du Collegio romano. Il avait entendu parler de manières divergentes des observations astronomiques de Galilei, et il voulait savoir ce que ses experts de l'église en pensaient. Endéans cinq jours, les mathématiciens jésuites du Collegio romano répondent à leur chef supérieur en confirmant pratiquement entièrementet correctement la factualité des observations de Galilei. 

 

Voici cette correspondance de consultation des experts mathématiciens. Elle est très importante pour la discussion de la nature du conflit entre Galilei et les Jésuites plus tard. 

 

 

DE ROBERTO BELLARMINO AUX MATHÉMATICIENS DU COLLÈGE ROMAIN. ROME, 19 AVRIL 1611 -

 

Je sais que vos éminences ont connaissance des nouvelles observations du ciel faites par un talentueux mathématicien grâce à un instrument appelé longue vue ou lunette ; moi-même j'ai vu, par l'intermédiaire de cet instrument, diverses choses merveilleuses autour de la Lune et de Vénus. Cependant, j'aimerais que vous me donniez sincèrement votre avis sur les points suivants :

 

1) s'ils constatent aussi la multitude des étoiles fixes, invisibles avec le seul oeuil naturel et en particulier, de la voie lactée et des nébuleuses, qui soient des amas étoiles très petites;

2) que Saturn ne soit pas une étoile simple mais trois étoiles réunies ensemble;

3) que l'étoile de Vénus ait des changements de forme, croissant et décroissant comme la lune;

4) que la lune ait la surface rugueuse et inégale;

5) qu'autour de la planète Jupiter tournent quatre étoiles mobiles, et de mouvements entre eux différents et très rapides. 

 

Ceci j'aimerais bien savoir, car j'en ai entendu parler de manières divergentes; et vos éminences, très experts dans les sciences mathématiques sauront me dire facilement si ces nouvautés sont bien fondées ou si elles sont seulement apparentes et pas vrais. Et s'il vous plaît, vous pourrez mettre la réponse dans cette même enveloppe. 

 

 

LES MATHÉMATICIENS DU COLLEGIO ROMANO À ROBERTO BELLARMINO À ROME. ROME LE 24 AVRIL 1611 -

 

Nous répondons avec cette carte, conformément à votre demande et à l'égard des différentes apparences que l'on voit au ciel avec la lunette, et dans le même ordre des questions avancées par vous. 

 

En ce qui concerne la première, il est vrai qu'apparaîssent beaucoup d'étoiles en regardant avec la lunette dans les nébuleuses du Cancre et des Pléiades; mais dans la voie lactée il n'est pas aussi certain que tout consiste d'étoiles minimes, et il paraît plutôt qu'il y y soient des parties plus denses en continu, bien que l'on ne peut pas nier que dans la voi lactée il y a beaucoup d'étoiles très petites. 

 

Il est vrai que pour ce que l'on voit dans les nébuleuses du Cancre et des Pléiades, on peut conjecturer probablement que dans la voie lactée se trouvent encore de grandes multitudes d'étoiles qui ne peuvent pas être discernées parcequ'elles sont trop petites. 

En ce qui concerne la deuxième demande, nous avons observé que Saturn n'est pas rond, comme on voit Jupiter ou Mars, mais de forme oblongue et ovulée comme ceci "oOo", mais nous n'avons pas vu les deux étoilettes détachée de celle du centre, que nous pouvons dire d'être des étoiles distinctes. 

 

En ce qui concerne la troisième demande, il est tout à fait vrai que Vénus change de forme et va croissant comme la Lune, et l'ayant vue nous le soir casiment pleine, nous avons observé que peu à peu la partie illuminée allait en diminuant, et que toujours elle était tourné vers le Soleil, devenant néanmoins plus pointue; et observéevaprès le matin, après la conjonction avec le Soleil, nous l'avons vue pointue avec sa partie illuminée tournée vers le Soleil. Maintenant elle va toujours croissant avec la lumière, et diminuant avec le diamètre visuel. 

 

En ce qui concerne la quatrième demande, on ne peut pas nier la grande inégalité de la Lune; mais il paraît au Père Clavio plus probable que le corps lunaire n'est pas de densité uniforme et qu'il y a des parties plus et moins denses, comme sont les taches ordinairesqu l'on voit aves la vue normale. 

 

D'autres pensent que la surface est vraiment inégale: mais jusqu'à présent nous n'avons pas ici tant de certitude que nous pouvons l'affirmer sans doute. 

 

En ce qui concerne la cinquième demande, on voit autour de Jupiter quatre étoiles qui se déplacent très rapidement, une fois vers l'Est une fois vers l'Ouest, les deux mouvements casiment en ligne droite: elles ne peuvent pas être des étoiles fixes, car elles ont un mouvement très rapide et très divers des étoiles fixes, et les distances entre elles et Jupiter changent continuellement. 

 

Ceci en tant que réponse à vos demandes. (Formule)

 

 

Aussi à la cour de Florence, toute la famille gran'ducale creuse le thème: Quel est le rapport entre les observations de Galilei et la compétence astronomique des auteurs de la Bible, notemment à l'égard du livre de Josué. 

 

Avant Noël 1613, à la cour de Florence, on organise un diner de contemplation philosophique sur la manière avec laquelle on pourrait réconcilier la Sainte Ecriture avec le mouvement de la terre. Galilei est au lit, il ne peut pas y participer, mais on lui rapporte en grand détail toute la discussion. Son élève le plus fameux y avait participé, Benedetto Castelli, professeur de mathématique à l'université de Pisa, bénédictin. C'est à lui que Galilei adresse une lettre sous la date du 21 décembre 1613, où Galilei, trop plein de zèle, développe toutes ses idées qu'il ne pouvait pas lui-même insérer au débat à la cour. Pendant un an, cette lettre circule en centaines d'exemplaire / copies et de main en main à Florence. Cette lettre est la clé de voute du cas Galilei. Elle est reprise en entier ci-après, ensemble avec le passus biblique incriminé et la lettre dedénonciation, qui mettait en marche tout le grand appareil du mécanisme juridico-administrativo-théologique de l'inquisition, dans une crise singulière du Vatican: réforme / contre-réforme.. 

 

 

A DON BENEDETTO CASTELLIA PISE. FLORENCE, 21 DÉCEMBRE 1613 -

 

Très Révérend Père et mon très honoré Seigneur,

Hier est venu me voir le sig. Niccolà Arrighetti qui m'a apporté de vos nouvelles; j'ai pris un plaisir infini à entendre de sa bouche ce dont je ne doutais pas, je veux dire la grande satisfaction que vous donnez à toute l'Université, tant aux surintendants qu'aux lecteurs eux-mêmes et aux écoliers de toutes les nations; et aussi que ces applaudissements n'ont pas accru le nombre de vos rivaux, comme il arrive d'habitude entre ceux de même profession, mais qu'ils les ont au contraire réduits à très peu; et que ces derniers concurrents devront eux aussi s'apaiser s'ils veulent éviter que l'émulation, qui parfois mérite le titre de vertu, ne vienne, dans leur cas, à changer de nom et à dégénérer en un sentiment coupable et, en fin de compte, plus préjudiciable à qui le manifeste qu'à nul autre. Mais ce qui a porté mon plaisir à son comble, c'est le récit qu'il m'a fait des propos que, grâce à la bienveillance de Leurs Altesses Sérénissimes, vous avez eu l'occasion de tenir, d'abord à leur table, puis dans la chambre de Madame Sérénissime, en présence du grand-duc, de la Sérénissime archiduchesse, des Illustrissimes et Excellentissimes D. Antonio et D. Paolo Giordano et de quelques très excellents philosophes. Et quelle plus grande ferveur pouvez-vous désirer que de voir Leurs Altesscs ellcs-mêmes se plaire à vos entretiens, vous exposer leurs doutes, en écouter les solutions et finalement rester satisfaites des réponses de Votre Paternité?

 

Certaines choses que vous avez dites et que m'a rapportée le signor Arrighetti ont été pour moi l'occasion de considérer à nouveau, d'un point de vue général, l'appel à l'écriture Sainte dans les disputes clé philosophie naturelle, et plus particulièrement le passage de Josué proposé en contradiction de la mobilité de la Terre et de la stabilité du Soleil par la grandeduchesse Mère, non sans quelques répliques de la Sérénissime archiduchesse. 

 

Quant à la question préalable posée par Madame Sérénissime, elle me semble des plus judicieuses, et c'est aussi très sagement qu'il a été accordé et établi par V. P. que jamais l'écriture Sainte ne peut mentir ou errer, mais que ses décrets sont d'une vérité absolue et inviolable. J'aurais seulement ajouté que si l'écriture ne peut errer, certains de ses interprètes et commentateurs le peuvent, et de plusieurs façons, dont une des plus communes et des plus graves serait de s'en tenir toujours au sens littéral, d'où l'on risquerait de tirer non seulement des contradictions mais des hérésies, voire des blasphèmes; on serait en effet nécessairement conduit à donner à Dieu des pieds, des mains, des yeux, à lui attribuer des affections corporelles et humaines, des sentiments tels que la colère, le rcpentir, la haine et même parfois l'oubli des choses passées et l'ignorance des futures. En conséquence : de même que dans l'Ecriture on trouve nombre de propositions qui, si l'on s'arrête au pur et simple sens des mots, semblent éloignées du vrai, mais sont présentées de la sorte pour s'adapter à la faible intelligence du vulgaire, de même, à l'intention des rares personnes qui méritent d'être séparées de la plèbe, il faut que de sages interprètes dégagent les significations véritables et fassent voir pour quelles raisons particulières elles ont été ainsi exprimées. 

 

étant donné donc que l'écriture, en de nombreux passages, non seulement se prête à des interprétations éloignées du sens apparent des termes mais les exige, il me semble que dans tout débat sur des questions naturelleson ne devrait l'alléguer qu'en dernière instance. En effet, l'Ecriture Sainte et la nature procédant pareillement du Verbe divin, celle-là en tant que révélation du Saint Esprit et celle-ci en tant que très fidèle exécutrice des ordres de Dieu; étant d'autre part accordé que l'écriture Sainte, pour s'adapter à l'intelligence universelle, dit souvent des choses qui, à première vue et quant au sens des mots, sont très éloignées de la vérité absolue, tandis quitte contraire la nature - inexorable, immuable, indifférente à ce que le secret de ses raisons et de ses modes d'action soient ou ne soient pas à la portée de la compréhension des hommes - ne transgresse jamais les limites des lois qui lui sont imposées; il apparaît que, des effets naturels, ce que l'expérience sensible nous fait voir ou ce qu'une démonstration nécessaire nous oblige à conclure, ne doit absolument pas être révoqué en doute au nom de tel passage de l'écriture qui, pris à la lettre, semblerait dire autre chose, puisque chaque mot de l'écriture Sainte n'est pas déterminé par des contraintes aussi rigoureuses que chaque effet de la nature. Bien plus, si l'écriture, dans le seul souci de s'accommoder à la capacité de peuples rudes et incultes, ne s'est pas fait faute de voiler ses dogmes les plus essentiels, attribuant à Dieu même des caractères tout à fait étrangers et contraires à son essence, qui oserait soutenir et affirmer que, laissant de côté ce même souci quand elle parle, fût-ce incidemment, de la terre, du Soleil ou de quelque autre créature, elle ait choisi de s'en tenir en toute rigueur au sens étroit et littéral des mots ? Et surtout pour dire, au sujet des créatures qui n'ont rien de commun avec l'intention première des livres saints, des choses telles que leur vérité nue et découverte eût tôt fait de contrarier cette première intention en rendant le vulgaire plus rétif aux conseils des articles concernant son salut?

 

Ceci posé et, de plus, étant évident que deux vérités ne peuvent se contredire, le devoir des interprètes sagaces est de se donner pour tâche de montrer que les véritables significations des textes sacrés s'accordent aux conclusions naturelles, aussitôt que nous ont rendus sûrs et certains le témoignage manifeste des sens ou d'irréfutables démonstrations je dirai plusles écritures, encore qu'inspirées par l'Esprit Saint, admettant en bien des passages, pour les raisons que j'ai alléguées, des interprétations éloignées de leur sens littéral, et nous-mêmes ne pouvant affirmer en toute certitude que leurs interprètes parlent tous sous l'inspiration divine, j'estimerais prudent de ne permettre à personne d'engager les sentences de J'écriture et de les obliger en quelque sorte à garantir la vérité, de telle conclusion naturelle dont il pourrait arriver que nos sens ou des démonstrations indubitables nous prouvent un jour le contraire. Et qui prétendra assigner une limite aux génies humains? Qui osera affirmer que tout ce qui est connaissable au monde est déjà connu?Aux articles relatifs au salut et au fondement de la foi, assez solides pour qu'il n'y ait aucun danger qu'on puisse dresser contre eux une doctrine valable et efficace, il serait donc, sans doute, de bon conseil de n'en point ajouter d'autres sans nécessité. Et s'il en est ainsi, dans quel désordre ne se jetterait-on pas en les ajoutant à la recette (le personnes dont nous ignorons si une vertu céleste les inspire et dont en outre nous voyons clairement qu'elles sont tout à fait dénuées de l'intelligence qui serait indispensable, je ne dis pas pour réfuter, mais pour comprendre les démonstrations par lesquelles procèdent les sciences les plus subtiles pour confirmer leurs conclusions?


Je croirai volontiers que l'autorité des lettres sacrées n'eut pas d'autre intention que d'enseigner aux hommes les articles et les propositions qui, nécessaires à leur salut et dépassant toute raison humaine, ne pouvaient être enseignés et rendus croyables sinon par la bouche même de 1'Esprit Saint. Mais que Dieu qui nous a cloué de sens, de raison et d'intellect ait voulu que nous négligions d'en retire usage, qu'il ait voulu nous donner un autre moyen de connaître ce que nous pouvons atteindre par eux, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de le croire, et surtout dans ces sciences dont l'écriture ne nous offre que d'infimes parcelles dispersées çà et là, ce qui est justement le cas de l'astronomie, dont il est si peu question dans les livres saints que les planètes ne s'y trouvent même pas nommées. Si les premiers auteurs sacrés avaient eu la pensée d'enseigner au peuple l'ordre et le mouvement des corps célestes, ils n'en auraient pas traité si brièvement, car ce qu'ils en disent n'est rien en comparaison des innombrables, des très hautes, des très admirables vérités que cette science enferme. 


Que Votre Paternité considère avec quel désordre, si je ne m'abuse, procèdent, quand ils disputent de questions naturelles qui ne sont pas directement défide, ceux qui mettent aussitôt en avant des passages de l'écriture trop souvent mal compris par eux. Mais si vraiment ils croient détenir le vrai sens de tel passage particulier de l'écriture, et par conséquent être assurés d'avoir en main, sur le point controversé, la vérité absolue, qu'ils me disent tout simplement s'ils estiment que, dans une dispute sur une question naturelle, celui qui se trouve soutenir le vrai a un grand avantage sur cet autre à qui revient la tâche de soutenir le faux. Je sais qu'à pareille question ils répondront oui; celui qui soutient le vrai, diront-ils, aura de son côté mille expériences, mille démonstrations nécessaires, tandis que l'autre n'aura du sien que sophismes, paralogismes et fallaces. Mais si, quant à eux, dans la limite des raisons naturelles et sans user d'autres armes que celles de la philosophie, ils ont conscience d'être à tel point supérieurs à leur adversaire, pourquoi, le moment venu de se mesurer avec lui, ne prennent ils pas aussitôt en main l'arme invisible et redoutable dont la seule vue épouvantera le plus habile et le plus entraîné des lutteurs?En vérité, je crois qu'au contraire ils seront les premiers épouvantés et que, se sentant incapables de résister aux assauts de l'adversaire, ils essaieront de trouver le moyen de ne pas lui permettre d'engager le combat. Mais comme celui qui a la vérité de son côté a, disions-nous, un grand, un très grand avantage sur la partie adverse, et comme il est impossible que deux vérités se contrarient, nous n'avons pas à craindre les attaques, d'où qu'elles viennent, pourvu que nous soit donnée la permission de parler et d'être écouté par des personnes capables de nous entendre et qui ne soient pas trop aveuglées par leurs propres intérêts et passions. 

 

En confirmation de quoi, j'en arrive maintenant à considérer le passage de Josué sur lequel vous avez donné à Leurs Altesses Sérénissimes trois éclaircissements. Je reprends le troisième que vous avez présenté comme venant de moi, ce qui est vrai, mais j'y ajoute quelques remarques supplémentaires que je ne crois pas avoir formulées jusqu'ici. 

 

Etant donc supposé et provisoirement accordé à l'adversaire que les paroles du texte sacré doivent être prises au pied de la lettre, autrement dit que Dieu arrêta le Soleil et prolongea le jour à la prière de Josué afin qu'il pût obtenir la victoire, mais étant fait droit aussi à ma demande de ne prévaloir des mêmes conditions, pour que l'adversaire ne présume pas qu'il va me lier et, quant à lui, rester libre de modifier ou d'altérer le sens littéral, je dis que ce passage nous montre manifestement la fausseté et l'impossibilité du système du monde aristotélicien et ptoléméen, et s'accorde au contraire fort bien au système de Copernic. 

 

Et d'abord, je demande à l'adversaire s'il sait de quels mouvcments se meut le Soleil. S'il le sait, il est forcé de me répondre que le Soleil se meut de deux mouvements qui sont le mouvement annuel d'occident en orient et le mouvement diurne d'orient en occident. 

 

En second lieu, je lui demande si ces deux mouvements, si différents et comme opposés l'un à l'autre, appartiennent au Soleil et lui sont également propres. A quoi il est obligé de répondre que non, mais qu'un seul de ces mouvements est propre et particulier au Soleil, à savoir l'annuel], car l'autre n'est aucunement le sien mais celui du dernier ciel ou premicr mobile qui entraîne en même temps le Soleil, les planètes et la sphère étoilée, les contraignant à tourner autour de la Terre en vingt-quatre heures d'un mouvement qui, comme je l'ai dit, est quasiment contraire à leur mouvement propre et naturel. 

 

J'en viens à la troisième qucstion et je demande lequel de ces deux mouvements produit le jour et la nuit : est-ce le mouvement propre du Soleil ou celui du premier mobile? Force est de répondre que le jour et la nuit résultent du mouvement du premier mobile, et que du mouvement propre du Soleil dépendent non pas le jour et la nuit mais les différcntcs saisons et l'année elle-même.

 

Or, si le jour dépend non du mouvement du Soleil mais de celui du premier mobile, qui ne voit que pour augmenter la durée du jour, il faut arrêter le premier mobile et non le Soleil? Bien plus, qui refusera, à supposer qu'il possède ces premiers éléments d'astronomie, de reconnaître que si Dieu avait arrêté le Soleil, il n'aurait pas allongé le jour, mais au contraire l'aurait écourté? En effet, le mouvement du Soleil étant opposé à la conversion diurne, plus le Soleil se déplacerait vers l'orient, d'autant plus il retarderait sa course vers l'occident; et si le mouvement du Soleil était retardé ou annulé, il atteindrait le couchant d'autant plus vite, accident très sensible dans le cas de la Lune dont la conversion diurne est plus lente que celle du Soleil dans la mesure même où son mouvement propre est plus rapide. étant donc absolument impossible, dans le système de Ptolémée et d'Aristote, d'arrêter le mouvement du Soleil et d'augmenter la durée du jour, ainsi que cela s'est produit suivant l'affirmation de l'écriture, il faut, ou bien admettre que les mouvements célestes ne sont pas ordonnés comme le veut Ptolémée, ou bien altérer le sens des mots et supposer que l'écriture, quand elle dit que Dieu arrêta le Soleil, veut dire qu'il arrêta le premier mobile, mais que, pour se mettre à la portée de gens tout juste capables de comprendre le lever et le coucher du Soleil, elle a dit le contraire de ce qu'elle eût dit s'adressant à des hommes mieux entendus. 

 

Il n'est d'ailleurs pas croyable que Dieu ait arrêté le Soleil seulement, sans interrompre le mouvement des autres sphères, car sans nécessité aucuneil eût ainsi changé l'ordre, les aspects et les positions des autres astres par rapport au Soleil et grandement perturbé tout le cours de la nature; mais il est croyable qu'il arrêta tout le système des sphères célestes, lesquelles, après ce temps de repos, sont revenues à leurs activités toutes ensemble, sans la moindre confusion ou altération. 

 

Mais puisque nous sommes convenus d'accepter sans aucun changement le sens littéral du texte, nous n'avons plus qu'à recourir à un autre système du monde et à voir, comme nous le verrons en effet, si le sens nu des mots peut, sans détours ni obstacles, s'y accorder. 

 

J'ai découvert et irréfutablement démontré que le globe du Soleil tourne sur lui-même, son entière conversion durant à peu près le temps d'un mois lunaire et s'effectuant dans le sens de presque toutes les autres conversions célestes; d'autre part, il est très probable et très vraisemblable que le Soleil, principal instrument et ministre de la nature et pour ainsi dire coeur du monde, donne non seulement la lumière, comme il apparaît clairement qu'il la donne, mais aussi le mouvement à toutes les planètes qui tournent autour de lui. Si donc, conformément à l'hypothèse de Copernic, nous attribuons à la Terre la rotation diurne sur elle-même, qui ne voit que pour arrêter tout le système et prolonger ainsi' sans perturber l'ensemble des relations réciproques entre les planètes, le temps de l'illumination diurne, il a suffi que le Soleil fût arrêté, comme le disent expressément les paroles du texte sacré?Voici donc comment, sans introduire aucune confusion dans les parties de l'univers et sans altérer en rien le sens littéral de l'écriture, on peut, en arrêtant le Soleil, prolonger le jour terrestre. 

 

J'ai écrit beaucoup plus que mon état de santé ne le comporte; je termine donc en me déclarant votre serviteur; je vous baise les mains et je prie N. S. de vous accorder de bonnes fêtes et toute félicité. 

 

De Florence, le 21 décembre 1613. 

De Votre Paternité Révérendissime,

Le très affectionné serviteur, 

Galileo Galilei

 


LIVRE DE JOSEPH CHAP. DIX

 

12 Alors Josué a parlé avec le Seigneur du jour, quand le Seigneur a délivré les Amorites devant les enfants d'Israel et parlait ainsi devant eux: Soleil arrête-toi à Gibéon et Lune dans la vallée de Ajalon

 

13 Alors le Soleil et la Lune s'arrêtaient jusqu'au moment que le peuple s'était vengé de ses ennemis. Ceci n'est-il pas écrit dans le livre des pieux? Ainsi le soleil est resté immobile au ciel et retardait son coucher toute une journée. 


14 n'était pas une si longue journée avant et
 après.

 

 

DE NICCOLO LORINI AU CARDINAL PAOLO CAMILLO SFRONDATI FLORENCE, 7 FÉVRIER 1615 -

FF 7R-12V. COPIE

 

Très illustre et très respectable Monsieur,

 

Au-delà du devoir banal de tout bon chrétien, c'est pas l'obligation qui incombe à tous les frères de Saint Dominique (étant donné que par leur Saint Père ont été instaurés les chiens blancs et noirs du Saint Office) et en particulier aux théologiens et prédicateurs que je prends la plume, moi, le plus petit d'entre tous, serviteur dévoué et au service particulier de Votre Sainteté très illustre, parce qu'un écrit est parvenu entre mes mains, écrit qui ici voyage d'une main à l'autre et qui est l'oeuvre de ceux qui se font appeler les "Galiléens", ceux qui affirment que la terre bouge alors que le ciel reste immobile, en suivant les positions de Copernic. 

 

Dans cet écrit, d'après tous les Pères de ce très religieux couvent de Saint Marc, il y a plusieurs propositions qui nous semblent suspectes ou téméraires, qui considèrent les Saintes Ecritures avec une fantaisie tout à fait inconvenante, qui, lorsqu'il s'agit de discuter des faits naturels, ne prennent absolument pas en compte les Saintes Ecritures. Le plus souvent, les conférenciers commettent des erreurs à propos de ces Ecritures qui ne devraient traiter que des articles concernant la foi. Ces propositions soutiennent que l'argument philosophique ou astronomique a plus de pertinence que le sacré ou le divin. Ces propositions sont soulignées par mes soins dans l'écrit dont il est question et dont je vous envoie une copie fidèle. Cet écrit soutient que quand Josué ordonna au soleil de s'arrêter dans le ciel, on ne doit pas comprendre que cet ordre ait été donné au soleil lui-même mais bien au premier objet mobile. Ce que je vois, quant à moi, c'est que ce document voyage de mains en mains sans qu'aucun ne le transmette aux supérieurs. 

 

Ils veulent commenter les Saintes Ecritures à leur façon à l'encontre des commentaires des Saints Pères. Ils défendent des opinions en tout point contraires aux Saintes Ecritures, on fait des exposés fantaisistes sur les Saints Pères Anciens et sur Saint Thomas, on foule des pieds toute la philosophie d'Aristote (la base même de la théologie scholastique). En somme, on répand mille impertinences à travers toute notre Cité, cette bonne cité de tradition catholique grâce à la vigilance de nos Princes Sérénissimes. 

 

C'est pour toutes ces raisons que j'ai pris la décision d'envoyer ce document à votre Sainteté Illustrissime afin que, pleine du saint zèle que votre position vous octroie, avec vos très illustres collègues, vous puissiez ouvrir les yeux sur cette situation et, si besoin en est, prévoir une correction, mettre les barrières que vous jugerez utiles afin que "parvus error in principio non sit magnus in fine" une erreur petite au départ ne devienne grande à la fin. 

 

J'aurais pu vous envoyer copie de certaines notes que dans ce couvent nous avions inscrites sur le document mais par modestie je m'en suis abstenu puisque je vous écris à vous qui savez beaucop de choses et à Rome qui, comme disait Saint Bernard, "linceos oculos habet", a des yeux de lynx. 

 

Tout ce que j'avance vient de ceux qui se nomment Galiléens, hommes de bien et bons chrétiens mais peu savants et durs dans leurs opinions. Ce service, je le rends par zèle et je supplie Votre Sainteté très illustre de garder ce document secret. Ce n'est pas une déposition officielle mais seulement un compte-rendu basé sur l'estime que je vous dois, comme un Serviteur envers son patron très particulier. 

 

De plus, je vous signale que deux leçons publiques sur ce document ont été tenues dans notre église de Sainte Marie Nouvelle par un Père supérieur, frère Tommaso Caccini, où il était question du livre de Josué, plus particulièrement le chapitre X. Je termine de la sorte, demandant votre sainte bénédiction et baisant le bas de votre vêtement et demandant quelques parties de...

 

 

Pendant une année on cherche l'original de la lettre. Puis les groupes d'experts se mettent en route: de longues délibérations procédurales. Mais une fois terminées les procédures, les conclusions et les actions se suivent coup sur coup:

           

• Le 24 février 1616 un comité de censure conclutque la première proposition (le soleil est centre du monde et ne se déplace pas) est formellement hérétique, et que la deuxième proposition (la terre n'est pas le centre du monde et elle se déplace) est, à l'égard de la vérité catholique, au moins erronnée dans la foie.

• Le 25 février 1616, le pape même donne instruction à Bellarmino qu'il convoque devant soi Galilei afin de l'exhorter, qu'il laisse tomber l'opinion copernicienne. Et si Galilei refusait (si recusaverit: protester / refuser ) d'obéir, le Père Commissaire, devant notaires et témoins, devrait lui ordonner qu'il s'arrête d'enseigner ou de défendre cette doctrine et opinion, aussi de la traîter; s'il n'acceptait pas, il serait incarcéré.

• Le 26 février 1616 suit l'admonition du Bellarmino à Galilei; le cardinal lui dit de laisser tomber l'opinion de Copernicus. Mais, le Père Commissaire lui signifie pratiquement qu'il ne prendra plus du tout le nom et les idées de Copernicus dans sa bouche ou sa plume. Ainsi on n'exécute pas minutieusement l'instruction papale: cette dernière prévoyait uniquement au cas ou Galilei refusait d'obéir à Bellarmino, une admonition plus sévère.

• Le 5 mars 1616, l'oeuvre de Copernicus est mise à l'index. 

 

 

Voici les documents officiels de la première procédure contre Galilei:

 

 

CENSURE DE QUELQUES PROPOSITIONS DE GALILEI. ROME FÉVRIER 1616 -

 

Proposition à censurer:

Que le Soleil soit centre du monde et par conséquence immobile de mouvement local. Que la terre n'est pas le centre du monde et ne pas immobile, mais se meut d'elle même, aussi de mouvement journalier. On tiendra une congrégation de qualification au Saint'Office le mardi 23 février à deux heures et demie l'aprèsmidi. Copie envoyée aux Messieurs les révérends pères théologues le 19 février 1616

 

Autres censures de propositions de Galilei

Rome, 24 février 1616 (autographe des signatures des théologues censeurs)

La censure des propositions à censurer fut faite au Saint'Office le mercredi 24 février 1616 devant les pères théologues soussignés. 

 

Première: Le soleil est le centre du monde et tout à fait immobile de mouvement local. 

Censure: Tous disent que la proposition mentionnée est imbécileet absurde en philosophie et formellement hérétique, car elle contredit clairement des phrases de la Sainte Ecriture dans beaucoup d'endroit selon la propriété de mots et selon explication commune et le sens des Saints Pères et des docteurs théologues.


Deuxième: La terre est ni le centre du monde ni immobile, mais elle se meut, aussi de mouvement journalier. 

Censure: Tous disent que cette proposition reçoive la meme censure en philosophie; et à l'égard de la vérité théologique elle est au moins erronée dans la foi. 

 


SUR LA CONVOCATION DE GALILEO DEVANT LE CARDINAL ROBERTO BELLARMINO. ROME, 25 FéVRIER 1616 -

 

L'illustrissime Monsieur Cardinal Millinus a notifié les révérends pères Messieurs les assesseurs et le Commissaire du Saint'Office, référence la censure des pères théologues à l'égard des propositions de Galilei:

Le Sanctissime (le Pape) a ordonné à l' illustrissime Monsieur le Cardinal Bellarmino qu'il convoque devant soi le nommé Galilei et qu'il l'admoneste de laisser tomber l'opinion citée; s'il refusait, le père Commissaire, devant le notaire et les témoins, devrait lui faire le précepte de s'abstenir tout à fait d'enseigner ou de défendre, aussi de traiter de la doctrine et opinion de n'importe quelle manière; s'il n'accepterait pas vraiment, il sera mis en prison. 



ADMONITION DE GALILEI PAR LE CARDINAL ROBERTO BELLARMINO. ROME, 26 FÉVRIER 1616 -

 

... le Cardinal Bellarmino a admonesté le précité Galilei de l'erreur de l'opinion susmentionnée et qu'il la laisse tomber; et ensuite immédiatement,... , présent aussi ledit illustrissime Monsieur le Cardinal, le susmentionné Père Commissaire a enseigné et donné l'ordre au nommé Galileo qu'il laisse tomber entièrement l'opinion susmentionnée, que le soleil soit le centre du monde et immobile et que la terre se meut, et que pour le reste il ne la tienne, ne l'enseigne ni la défende, de n'importe quelle manière, par parole ou par écrit; si non il sera procédé contre lui au Saint'Office. 

Galilei a accepté ce précepte et a promis d'obéir...

 

 

DECRETUM

 

Sacrae Congregationis Illustrissimorum SR. E Cardinalium, a S. D. N. Paulo Papa V Sanctaque Sede Apostolica ad Indicem librorum, eorumque permissionem, proibitionem, expurgationem et impressionem in universa Republica Christiana, specialiter deputatorum ubique publicandum. 

 

Cum ab aliquo tempore citra prodierint in lucem inter alios nonnulli libri varias haereses atque errores continentes, ideo Sacra Congregatio Illustrissimorum SRE Cardinalium ad Indicem deputatorum, ne ex eorum lectione graviora in dies damna in tota Republica Christiana oriantur, eos omnino damnandos atque prohibendos esse voluit; sicuti praesenti Decreto poenitus damnat et prohibet, ubicumque et quovis idiomate impressos aut imprimendos:mandans ut nullus deinceps, cuiuscumque gradus et conditionis, sub poenis in Sacro Concilio Tridentino et in Indice librorum prohibito rum contentis, eos audeat imprimere aut imprimi curare, vel quomodocumque apud se detinere aut legere; et sub iisdem poenis, quicumque nunc illos habent vel habuerint in futurum, locorum Ordinariis seu Inquisitoribus, statim a praesentis Decreti notitia, exhibere teneantur Libri autem sunt infrascripti, videlicet: 

 

Theologiae Calvinistarum libri tres, auctore Conrado Schlusserburgio. 

Scotanus Redivivus, sive Comentarius Erotematicus in tres priores libros codicis, etc. Gravissimae quaestionis Christianarum Ecclesiarum in Occidentis praesertim partibus, ab Apostolicis temporibus ad nostram usque aetatem continua successione et statu, historica explicatio, auctore Iacobo Usserio, Sacrae Theologiae in Dulbiniensi Academia apud Hybernos professore. 

 

Friderici Achillis, Ducis Vvertemberg, Consultatio de principatu inter Provincias Europae, habita Tubingiae in Illustri Collegio, Anno Christi 1613. 

Donelli Enucleati, sive commentariorum Hugonis Donelli de Iure Civili, in compendium ita redactorum etc. 

 

Et quia etiam ad notitiam praefatae Sacrae Congregationis pervenit, falsam illam doctrinam Pithagoricam,divinaeque Scripturaeomnino adversantem, de mobilitate terrae et immobilitate solis, quam Nicolaus Copernicus De revolutionibus orbium coelestium et Didacus Astunica in Job, etiam docent,iam divulgari et a multis recipi; sicuti videre est ex quadam Epistola impressa cuiusdam Patris Carmelitae, cui titulus: "Lettera del R. Padre Maestro Paolo Antonio Foscarini Carmelitano, sopra l'opinione de' Pittagorici e del Copernico della mobilità della terra e stabilità del sole, e il nuovo Pittagoricosistema del mondo. In Napoli, per Lazzaro Scoriggio, 1615", in qua dictus Pater ostendere conatur praefatam doctrinam de immobilitate solis in centro mundi et mobilitate terrae consonam esse veritati et non adversari Sacrae Scripturae; ideo, ne ulterius huiusmodi opinio in perniciem Catholicae veritatis serpat, censuit, dictosNicolaum Copernicum De revolutionibus orbium, et Didacum Astunica in Job, suspendos esse, donec corrigantur; librum vero Patris Pauli Antonii Foscarini Carmelitae omnino prohibendum atque damnandum; aliosque omnes libros, pariter idem docentes, prohibendos: prout praesenti Decreto omnes respective prohibet, damnat atque suspendit. In quorumfidem praesens Decretum manu et sigillo Illustrissimi et Reverendissimi D. Cardinalis S. Caeciliae, Episcopi Albanensis, signatum et munitum fuit, die 5 Martii 1616. 

 

 

P., Episc. Albanen., Card. S. Caeciliae. 

Locussigilli. 

Registr fol 90

 

F. Franciscus Magdalenus Capiferreus,

Ord. Praedic., Secret. 

Romae, ex Typographia Camerae Apostolicae, M. DCXVI. 

 

 

Le document qui suit est un document extrèmement étonnant sous un angle bien particulier d'argumentation, qui, apparemment, n'a pas été avancée jusqu'à présent: la lettre est datée 1615, donc sans date précise, mais définitivement avant l'exhortation de Galilei par le cardinal Bellarmino et le chef de l'Inquisition. Le contenu du document suggère que Galilei a dû faire une recherche théologique dans les opinions des pères de l'église à l'égard de l'interprétation de la Bible en relation avec la Création (Genesis). Probablement il s'est fait aider par des experts théologiens amis, peut être même Benedetto Castelli, car il y sort de nombreux arguments très pertinents tirés notemment de Saint Augustin (DE GENESI AD LITERAM), afin de justifier aisément son approche "Bible - Système héliocentrique" avec l'aide de Saint Augustin. 

 

Quand on se rend compte que le problème de la correction du calendrier (à la suite des règles de calcul des fêtes réligieuses établies à NIKAIAen 325 et les imprécisions que ces règles ont introduit par la suite) a reçu l'interdiction de discussion de l'église pendant de nombreux siècles, et fut résolu seulement au 16e siècle avec la réforme grégorienne du calendrier (4 octobre 1582), basée sur les travaux de Copernicus, et ce refus de discussion ayant été basé sur l'argument que l'autorité des Pères de l'eglise aurait pu être mis en question, Galilei, lors de son procès de 1632/1633 et même depuis l'exhortation en 1616, aurait pu se servir très bien de ces arguments de Saint Augustin. A la place de Galilei, j'aurais repris tous ces arguments dans le proemio du "Dialogo sopra I due Massimi Sistemi", mieux encore: les sortir beaucoup plus tôt, par exemple dans son litige avec les mathématiciens du Collegio romano, dans le "Saggiatore". Que Galilei ne s'était pas servi de ces arguments (l'autorité de Saint Augustin) par la suite, prouve, une fois de plus, qu'il n'a pas mené sa barque en malin. 

 

Bien entendu, dans ce contexte, il faudrait aussi se poser la question, si l'autorité de Saint Augustin aurait pu oeuvrer quelquechose afin de sortir l'administration minable du Vatican de son dilemme de sauver la face: Galilei exhorté par un zèle aveugle et enfantin, Copernicus à l'index pour son mérite d'avoir mis la réforme grégorienne du calendrier sur une base valable et finalement l'imprimatur donné au DIALOGO par une administration qui n'avait pas fait un travail critique et sérieux. 

 

Comme nous allons le voir: le problème du Vatican n'est pas d'avoir commi une erreur, mais d'avoir eu besoin de deux siècles afin de comprendre la Création à l'égard du système solaire et d'enlever le DIALOGO de l'index. Il s'agit d'une hypocrisie prototype. 

 

Même encore aujourd'hui, les idées de Saint Augustin pourraient inspirer bien de théologiens a développer un rapport plus salubre à l'égard des faits de l'univers, malgré les conclusions bizarres qu'il a tiré de la mort de son fils Theodatus. 

 

Le document qui suit me paraît important, pour les raisons énoncées.

 

A MADAMA CRISTINA DI LORENA GRANDUCHESSA DI TOSCANA 1615 -

Lien du document

 

Avec sa lettre à Bénédetto Castelli, Galilei avait penétré dans la chasse gardée des théologues, l'exégèse de la Bible. Ce qui a suscité la vigilance du contrôle de la foi, etait le fait qu'une élaboration quasi-théologique touchait un public répandu (la ville de Florence). La préoccupation primordiale était surtout la conservation du pouvoir catholique (réforme / contre-réforme). Sous cette angle, l'affaire était tellement importante, qu'une consultation d'experts, même du Collegio romano, n'entrait plus en ligne de compte. Cet aspect de vérité scientifique était d'office tout à fait secondaire au maintien du pouvoir des théologues. 

 

Ce qui est néanmoins très curieux est que l'instruction du pape ne fut pas exécutée à la lettre: selon l'instruction du pape du 25 février 1616, Bellarmino aurait dû exhorter Galilei qu'il laisse tomber l'opinion de Copernicus, et seulement au cas ou Galilei refusait (si recusaverit), le Père Commissaire aurait dû lui ordonner de manière sévère la deuxième partie de l'instruction du pape. 

Or, selon le compte-rendu de la rencontre Galilei - Bellarmino et apparemment, après l'exhortation de Galilei, on ne lui a pas posé la question, s'il acceptait d'obéir, mais on est passé directement à la deuxième partie de l'instruction du pape, la grande artillerie du Commissaire. 

 

Après cela, "Galilei a accepté cet ordre et a promis d'obéir".

 

Avec les termes de la documentation du Vatican, ici présentée, Galilei avait les pieds et les mains liés et la bouche fermée. ("Tu la boucle pour toujours. ")

Pour le procès proprement dit, plus tard, 1633, il n'y avait donc plus d'option Copernicusou Ptolemé, mais le problème à venir était tout simplement qu'il n'a pas obéi à l'ordre de l'église, qu'il n'a pas tenu ce qu'il avait promis. 

 

Galilei n'avait rien d'écritenmain. Rentré à la maison, il aurait dû se faire un compte-rendu minutieux, se rappeler tous les verbes, tous les adjectifs..., pour ne pas oublier plus tard. Il est resté encore un certain temps à Rome, chez des amis. A Rome, il y avait des bruits qui couraient, qu'ilavait abjuré. Pour se munir contre des calomnies de ce genre, Galilei demanda à Bellarmino une attestation et l'obtient. 

 

La-voilà. Elle constate, que l'on ne peut pas ni défendre ni tenir la "doctrine" de Copernicus et, ainsi, est beaucoup plus faible, que le précepte du Père Commissaire. C'est d'ailleurs un argument en faveur de ma thèse, que l'instruction du pape ne fut pas exécutée correctement. Ici, Bellarmino ne cite que la partie de l'instruction donée à lui, Bellarmino et ne mentionne pas le précepte du Commissaire, qui va, comme nous l'avons vu, beaucoup plus loin. 

 

Et c'est le seul document, de terminologie faible, que Galilei ait en main pour son procès plus tard. Mais cette situation de fait a dû lui travailler coeur et cerveau. Nous le verrons plus tard, quand il remonte à l'attaque avec un sens de réalité amoindri. 

 

 

ROBERTO CARDINALE BELLARMINO. COPIE DE L'ATTESTATION DU CARDINAL ROBERTO BELLARMINO. ROME, LE 26 MAI 1616 -

COPIE DE LA MAIN DE GALILéE

 

Nous, Cardinal Robert Bellarmino, ayant appris que Mr Galileo Galilei a été calomnié et accusé d'avoir abjuré et pour cela d'avoir été puni de punitions salutaires et étant à la recherche de la vérité, déclarons que Mr Galileo n'a pas abjuré par devant nous ni devant qui que ce ne soit ni ici à Rome ni dans aucun autre endroit que nous connaissions. Il n'a abjuré aucune de ses opinions, ni doctrines, il n'a reçu aucune sorte de punition. Seulement la déclaration faite par notre Seigneur et publiée par la Sainte Congrégation de l'Indexlui a été signifiée. Cette déclaration signale que la doctrine attribuée à Copernic selon laquelle la Terre tourne autour du Soleil et selon laquelle le Soleil est le centre du monde sans bouger d'Orient à Occident, que cette doctrine est contraire aux Saintes Ecritures et que dès lors elle ne peut être ni défendue ni soutenue. En foi de quoi, nous avons écrit et signé la présente de notre propre main ce 26 mai 1616. 

 

Le même

Cardinal Robert Bellarmino

 

 

En 1618, trois comètes se révèlent au ciel. Galilei est au lit; il ne peut pas les observer de manière systématique. Les jésuites, par contre, du Collegio romano, s'organisent avec les jésuites de Antwerpen, de Parma et de Innsbruck, pour mesurer des parallaxes, afin de déterminer leursdistances de la terre. A Rome, ils organisent une disputation astronomique en public et publient les résultats de leurs mesures et de leurs conclusions:

"DE TRIBUS COMETIS ANNI M. DCXVIII DISPUTATIO ASTRONOMICA PUBLICE HABITA IN COLLEGIO ROMANO SOCIETATIS IESU". Dans le texte de leur publication, ils disent"quod cometa, tubo optico inspectus, vix ullum passus est incrementum;" que la comète ne paraissait pas tellement aggrandie dans le tube optique. De cette observation, facilement compréhensible de par la faible luminosité de ces instruments, Galilei en fait plusieures pages: Son monopole d'autorité d'observation astronomique est en danger et son telescope ne travaille pas de manière convenable! Mais les jésuites parlent de "la comète", et Galilei les cite de manière imprécise: de "la tête de la comète", ce qui ne se trouve pas dans la publication des jésuites!

 

Mario Guiducci, un disciple de Galilei et secrétaire de l'académie de Florence, publie un "DISCORSO DELLE COMETE" sous son seul nom, tandis que le manuscrit sort pour la plus grande partie de la plume de Galilei, qui, apparemment n'ose pas s'exposer trop après son hiatus avec les théologues de 1616. Ce "Discorso" est assez polémique et aggressif, et sur un point important non précis. Les jésuites y voient sans difficulté la plume de Galilei, qui se cache derrière Guiducci. Le chef des mathématiciens du Collegio romano, Horatio Grassi Salonensi, se cache derrière un anagramme "Lothario Sarsio Sigensano", riposte contre le "DISCORSO" avec une oeuvre "LIBRA ASTRONOMICA AC PHILOSOPHICA QUA GALILAEI GALILAEI OPINIONES DE COMETIS", encore en 1619, et il s'en suit un conflit qui traine des années et des années, jusqu'à environs 1625. Ce conflit sert aussi comme toile de fonds pour le livre de Redondo "Galilei eretico", beaucoup de prose sans force de conviction. 

 

Un détail encore de l'oeuvre initiale des jésuites "De tribus cometis": En marge, elle cite un fait "Ex Kepleri Ephemeridibus". Cela veut tout simplement dire que les jésuites acceptent Kepler ainsi queCopernicus derriére, comme autorité, car ces éphemérides de Kepler furent publiées en 1617 (première partie) et établies, bien entendu, selon la "doctrine" de Copernicus, doctrine qui venait d'être condannée comme pernicieuse pour la foi catholique, à peine trois années passées. 

 

Il s'en suit une guerre littéraire qui sévit pendant de longues années, jusqu'à 1625, entre Galilei et Grassi, la tête du Collegio romano. 

 

Une synopsis de la bataille en prose entre les mathématiciens du Collegio romano et Galilei me paraît utile:

 

 

1) DE TRIBUS COMETIS ANNI M. DC. XVIII DISPUTATIO ASTRONOMICA PUBLICE HABITA IN COLLEGIO ROMANO SOCIETATIS IESU AB UNO EX PATRIBUS EIUSDEM SOCIETATIS ROMAE MASCARDI / MDCCXIX

 

2) DISCORSO DELLE COMETE DI MARIO GUIDUCCI FATTO DA LUI NELL' ACCADEMIA FIORENTINA FIRENZE / CECCONCELLI, 1619

 

3) LIBRA ASTRONOMICA AC PHILOSOPHICA QUA GALILAEI GALILAEI OPINIONES DE COMETIS A MARIO GUIDUCIO IN FLORENTINA ACADEMIA EXPOSITAE, ATQUE IN LUCEM NUPER EDITAE EXAMINANTUR A LOTHARIO SARSIO SIGENSANO PERUSIAE / NACCARINI, M. DC. XIX

 

4) IL SAGGIATORE GALILEO GALILEI ROMA / MASCARDI / 1623

 

5) RATIO PONDERUM LIBRAE ET SIMBELLAE LOTHARIO SARSIO SIGENSANO LUTETIAE PARISIORUM /CRAMOISY / M. DC. XXVI

 

 

IL SAGGIATORE

 

48. "Sed* obiicit praeterea: Quamvis admittatur, ex motu accendi exhalationes aliquando posse, nescire tamen se intelligere, qui fiat ut statim atque ignem conceperint, non consumantur, sicuti in fulminibus, stellis cadentibus aliisque huiusmodi fieri quotidie videmus. Ego vero satis id intelligi posse existimo, si quis, ex iis quos hominum ars atque industria invenit ignibus, similiter de sublimioribus illis a natura succensis philosophetur. Duplicis enim naturae nostri hi sunt: sicci alii ac rari nulloque haerentes glutine, qui, ut ignem conceperint, claro largoque fulgore, subito incremento, at caduco brevique incendio, nullis pene reliquiis, conflagrare solent; alii tenaciori materia compacti ac piceo liquore confiati, in longum tempus duraturi, flamma diuturniore nocturnas. nobis tenebras illustrant. Quidni igitur in supremis illis regionibus simile aliquid contingat? Vel enim materia levis adeo rara et sicca est, ut nullo humidi vinculo colligetur; atque haec subito celerique fulgore, in suo veluti exortu interitura, succenditur: vel certe viscida est et glutinosa; quae, si quo casu accendatur, non ad interitum illico properet, sed suo plane succo diutius vivat, ac longiore aetate, suspicientibus undique mortalibús, ex alto resplendeat. Satis igitur hinc apparet, qui possit fieri ut ignes in summo aëre succensi non illico extinguantur aliquando, sed diutius ardeant: apparet etiam, aërem succendi posse, si ea praesertim adsint quae calori ex attritu excitando plurimum conferunt, vehemens videlicet motus, exhalationum copia, materia attenuatio, et si quid aliud ad idem conducit."

 

*. "Ma obietta ancora: quantunque si ammetta che talvolta le esalazioni possano aceendersi col moto, non sa comprendere come avvenga che non si consumino appena avranno concepito il fuoco, come vediamo ogni giorno accadere nei fulmini, nelle stelle cadenti e altri simili meteore. Io invece credo che questo si possa capire abbastanza se, traendo esempio da quei fuochi che trovò l'arte e l'industria degli uomini, si ragioni similmente per quelli più alti accesi dalla natura. Questi nostri sono di duplice specie: alcuni secchi e non densi e non aderenti per nessun glutine, che, appena accolto il fuoco, sogliono ardere con chiaro e vasto fulgore e subito incremento, ma con breve e caduco incendio, senza quasi alcun residuo; altri, fatti di materia più tenace e fusi insieme con liquido di pece, duraturi, con fiamma più durevole c'illuminano le tenebre notturne. Perché qualcosa di simile non potrebbe accadere dunque in quelle altissime regioni? Infatti o la materia lieve è tanto rarefatta e secca che non è tenuta unita da nessun vincolo di umido, e questa s'infiamma con fulgore improvviso e celere, come destinata à morire nel nascere, o è viscida e glutinosa e, se per caso s'accende, non si spegne subito ma vive più a lungo del suo stesso umore e più a lungo risplende dall'alto ai mortali ammirati. Da questo si vede abbastanza come può accadere che i fuochi accesi nell'aria talvolta non si estinguono subito, ma ardono abbastanza a lungo: si vede anche che l'aria può infiammarsi, soprattutto se vi sono quegli elementi che molto importano a eccitare calore dall'attrito, cioè moto impetuoso, abbondanza di esalazioni, attenuazione di materia e qualunque altra cosa che porti allo stesso effetto."

 

Legga or V. S. Illustrissima quel che resta fino al fine di questa proposizione; nel qual proposito poco mi resta che dire, avendone detto assai di sopra. Per tanto metterò solo in considerazione, come il Sarsi, per mantenere che l'incendio della cometa possa durare mesi e mesi, ancor che gli altri che si fanno in aria, come baleni, fulmini, stelle discorrenti e simili, sieno momentanei, assegna due sorti di materie combustibili: altre leggieri, rare, secche e senz'alcun collegamento d'umidità; altre viscose, glutinose, e in conseguenza con qualche umidità collegate: delle prime vuol che si facciano gli abbruciamenti momentanei; delle seconde, gl'íncendii diuturni, quali sono le comete. Ma qui mi si rappresenta una assai manifesta repugnanza e contradizzione: perché, se così fusse, dovrebbono i baleni e i fulmini, come quelli che si fanno di materia rara e leggiera, farsi nelle parti altissime, e le comete, come accese in materia più glutinosa, corpulenta, ed in conseguenza più grave, nelle parti più basse; tuttavia accade il contrario, perché i baleni ed i fulmini non si fanno alti da terra né anco un terzo di miglio, sì come ci assicura il piccolo intervallo di tempo che resta tra il veder noi il baleno e '1 sentire il tuono, quando ci tuona sopra il vertice; ma che le comete sieno indubitabilmente senza comparazione più alte, quando altro non ce lo manifestasse a bastanza, l'abbiamo dal lor movimento diurno da oriente in occidente, simile a quello delle stelle. E tanto basti aver considerato intorno a queste esperienze. 

 

Restami ora che, conforme alla promessa fatta di sopra a V. S. Illustrissima, io dica certo mio pensiero intorno alla proposizione "Il moto è causa di calore" (ARISTOTELE De caelo, 11, 7). mostrando in qual modo mi par ch'ella possa esser vera. Ma prima mi fa di bisogno fare alcuna considerazione sopra questo che noi chiamiamo caldo, del qual dubito grandemente che in universale ne venga formato concetto assai lontano dal vero, mentre vien creduto essere un vero accidente affezzione e qualità che realmente risegga nella materia dallaquale noi sentiamo riscaldarci. 

 

Per tanto io dico che ben sento tirarmi dalla necessità, subito che concepisco una materia o sostanza corporea, a concepire insieme ch'ella è terminata e figurata di questa o di quella figura, ch'ella in relazione ad altre è grande o piccola, ch'ella è in questo o quel luogo, in questo o quel tempo, ch'ella si muove o sta ferma, ch'ella tocca o non tocca un altro corpo, ch'ella è una, poche o molte, né per veruna imaginazione posso separarla da queste condizioni; ma ch'ella debba essere bianca o rossa, amara o dolce, sonora o muta, di grato o ingrato odore, non sento farmi forza alla mente di doverla apprendere da cotali condizioni necessariamente accompagnata: anzi, se i sensi non ci fussero scorta, forse il discorso o l'immaginazione per se stessa non v'arriverebbe già mai. Per lo che vo io pensando che questi sapori, odori, colori, etc. , per la parte del suggetto nel quale ci par che riseggano, non sieno altro che puri nomi, ma tengano solamente lor residenza nel corpo sensitivo, sì che rimosso l'animale, sieno levate ed annichilate tutte queste qualità; tuttavolta però che noi, sì come gli abbiamo imposti nomi particolari e differenti da quelli de gli altri primi e reali accidenti, volessimo credere ch'esse ancora fussèro veramente e realmente da quelli diverse. 

 

(Questa dottrina delle qualità dei corpi, che saranno poi dette "oggettive" (figura, moto, numero) e soggettive (colori, sapori, odori, suoni), le prime appartenenti in proprio ai corpi, le seconde appartenenti soltanto a noi, esseri senzienti, dopo Galileo viene svolta da Giovanni Locke (Wrington, 1632 - Londra, 1704) nel Saggio sull'intelletto umano (1690), che distingue le qualità primarie, (oggettive) e le qualità secondarie (soggettive). Cfr. VITO FAZIO-ALLMAYER, Galileo Galilei, Palermo, Sandron, 1912, p. 85; G. GALILEI, Vita ed opere per saggi criticamente disposti, a cura di N. Vaccalluzzo ed E. Boggio Lera, Milano, Vallardi, 1912, p. 264, n. 5. )

 

Io credo che con qualche essempio più chiaramente spiegherò il mio concetto. Io vo movendo una mano ora sopra una statua di marmo, ora sopra un uomo vivo. Quanto all'azzione che vien dalla mano, rispetto ad essa mano è la medesima sopra l'uno e l'altro soggetto, ch'è,di quei primi accidenti, cioè moto e toccamento, né per altri nomi vien da noi chiamata: ma il corpo animato, che riceve tali operazioni, sente diverse affezzioni secondo che in diverse parti vien tocco; e venendo toccato, verbigrazia, sotto le piante de' piedi, sopra le ginocchia o sotto l'ascelle, sente, oltre al commun toccamento, un'altra affezzione, alla quale noi abbiamo imposto un nome particolare, chiamandola solletico: la quale affezzione è tutta nostra, e non punto della mano; e parmi che gravemente errerebbe chi volesse dire, la mano, oltre al moto ed al toccamento, avere in sé un'altra facoltà diversa da queste, cioè il solleticare, sì che il solletico fusse un accidente che risedesse in lei. Un poco di carta o una penna, leggermente fregata sopra qualsivoglia parte del corpo nostro, fa, quanto a sé, per tutto la medesima operazione, ch'è muoversi e toccare; ma in noi, toccando tra gli occhi, il naso, e sotto le narici, eccita una titillazione quasi intollerabile, ed in altra parte a pena si fa sentire. Or quella titillazione è tutta di noi, e non della penna, e rimosso il corpo animato e sensitivo, ella non è più altro che un puro nome. Ora, di simile e non maggiore assistenza credo io che possano esser molte qualità che vengono attribuite a i corpi naturali, come sapori, odori, colori ed altre. 

 

Un corpo solido, e, come si dice, assai materiale, mosso ed applicato a qualsivoglia parte della mia persona, produce in me quella sensazione che noi diciamo tatto, la quale, se bene occupa tutto il corpo, tuttavia pare che principalmente risegga nelle palme delle mani, e più ne i polpastrelli delle dita, co' quali noi sentiamo piccolissime differenze d'aspro, liscio, molle e duro, che con altre parti dei corpo non così bene le distinguiamo; e di queste sensazioni altre ci sono più grate, altre meno, secondo la diversità delle figure de i corpi tangibili, lisce o scabrose, acute o ottuse, dure o cedenti: e questo senso, come più materiale de gli altri e ch'è fatto dalla solidità della materia, par che abbia riguardo all'elemento della terra. (Ai quattro elementi tradizionali (terra, acqua, aria, fuoco) di Empedocle, Galileo fa corrispondere quattro sensi: alla terra il tatto; all'acqua il gusto; al fuoco l'olfatto; all'udito l'aria. Aggiunge poi, per la vista, la luce, immateriale, che per lui è l'etere. )

 

E perché di questi corpi alcuni si vanno continuamente risolvendo in particelle minime, delle quali altre, come più gravi dell'aria, scendono al basso, ed altre, più leggieri, salgono ad alto; di qui forse nascono due altri sensi, mentre quelle vanno a ferire due parti del corpo nostro assai più sensitive della nostra pelle, che non sente l'incursioni di materie tanto sottili tenui e cedenti: e quei minimi che scendono, ricevuti sopra la parte superiore della lingua, penetrando, mescolati colla sua umidità, la sua sostanza, arrecano i sapori, soavi o ingrati, secondo la diversità de' toccamenti delle diverse figure d'essi minimi, e secondo che sono pochi o molti, più o men veloci; gli altri, che ascendono, entrando per le narici, vanno a ferire in alcune mammillule che sono lo strumento dell'odorato, e quivi parimente son ricevuti i lor toccamenti e passaggi con nostro gusto o noia, secondo che le lor figure son queste o quelle, ed i lor movimenti, lenti o veloci, ed essi minimi, pochi o molti. E ben si veggono providamente disposti, quanto al sito, la lingua e i canali del naso: quella, distesa di sotto per ricevere l'incursioni, che scendono; e questi, accommodati per quelle che salgono: e forse ál'eccitar i sapori si accommodano con certa analogia i fluidi che per aria discendono, ed a gli odori gl'ignei che ascendono. Resta poi l'elemento dell'aria per li suoni: i quali indifferentemente vengono a noi dalle parti basse e dall'alte e dalle laterali, essendo noi costituiti nell'aria, il cui movimento in se stessa, cioè nella propria regione, è ugualmente disposto per tutti i versi; e' la situazion dell'orecchio è accommodata, il più che sia possibile, a tutte le positure di luogo; ed i suoni allora son fatti, e sentiti in noi, quando (senz'altre qualità sonore o transonore) un frequente tremor dell'aria, in minutissime onde increspata, muove certa cartilagine di certo timpano ch'è nel nostro orecchio. Le maniere poi esterne, potenti a far questo increspamento nell'aria, sono moltissime; le quali forse si riducono in gran parte al tremore di qualche corpo che urtando nell'aria l'increspa, (Le maniere... increspa: nota il dubbio nel "forse"e nell'"in gran parte"sulle fonti sonore. Cfr. a pp. 199-200 di questo volume la favola dei suoni. ) e per essa con gran velocità si distendono l'onde, dalla frequenza delle quali nasce l'acutezza del suono, e la gravità dalla rarità. Ma che ne' corpi esterni, per eccitare in noi i sapori, gli odori e i suoni, si richiegga altro che grandezze, figure, moltitudini e movimenti tardi o veloci, io non lo credo; e stimo che, tolti via gli orecchi le lingue e i nasi, restino bene le figure i numeri e i moti, ma non già gli odori né i sapori né i suoni, li quali fuor dell'animai vivente non credo che sieno altro che nomi, come a punto altro che nome non è il solletico e la titillazione, rimosse l'ascelle e la pelle intorno al naso. E come a i quattro sensi considerati ànno relazione i quattro elementi, così credo che per la vista, senso sopra tutti gli altri eminentissimo, abbia relazione la luce, ma con quella proporzione d'eccellenza qual è tra '1 finito e l'infinito, tra '1 temporaneo e l'instantaneo, tra '1 quanto e l'indivisibile, tra la luce e le tenebre. Di questa sensazione e delle cose attenenti a lei io non pretendo d'intenderne se non pochissimo, e quel pochissimo per ispiegarlo, o per dir meglio per adombrarlo in carte, non mi basterebbe molto tempo, ' e però lo pongo in silenzio. 

E tornando al primo mio proposito in questo luogo, avendo già veduto come molte affezzioni, che sono reputate qualità risedenti ne' soggetti esterni, non ànno veramente altra assistenza che in noi, e fuor di noi non sono altro che nomi, dico che inclino assai a credere che il calore sia di questo genere, e che quelle materie che in noi producono e fanno sentire il caldo, le quali noi chiamiamo con nome generale fuoco, siano una moltitudine di corpícelli minimi (E qui ripresa la teoria di Dernocirito sul calore) intal e tal modo figurati, mossi contanta e tanta velocità; li quali, incontrando il nostro corpo, lo penetrino con la lor somma sottilità, e che il lor toccamento, fatto nel lor passaggio per la nostra sostanza e sentito da noi, sia l'affezzione che noi chiamiamo caldo, grato o molesto secondo la moltitudine e velocità minore o maggiore d'essi minimi che ci vanno pungendo e penetrando, sì che grata sia quella penetrazione per la quale si agevola la nostra necessaria insensibil traspirazione, molesta quella per la quale si fa troppo gran divisione e risoluzione nella nostra sostanza: sì che in somma l'operazion del fuoco per la parte sua non sia altro che, movendosi, penetrare colla sua massima sottilità tutti i corpi, dissolvendogli più presto o più tardi secondo la moltitudine e velocità degl'ignicoli e la densità o rarità della materia d'essi corpi; de' quali corpi molti ve ne sono de' quali, nel lor disfacimento, la maggior parte trapassa in altri minimi ignei, e va seguitando la risoluzione fin che incontra materie risolubili. Ma che oltre alla figura, moltitudine, moto, penetrazione e toccamento, sia nel fuoco altra qualità, e che questa sia caldo, io non lo credo altrimenti; e stimo che questo sia talmente nostro, che, rimosso il corpo animato e sensitivo, il calore non resti altro che un semplice vocabolo. Ed essendo che questa affezzione si produce in noi nel passaggio e toccamento de' minimi ignei per la nostra sostanza, è manifesto che quando quelli stessero fermi, la loro operazion resterebbe nulla: e così veggiamo una quantità di fuoco, ritenuto nelle porosità ed anfratti di un sasso calcinato, non ci riscaldare, ben che lo tegniamo in mano, perch'ei resta in quiete; ma messo il sasso nell'acqua, dov'egli per la di lei gravità ha maggior propensione di muoversi che non aveva nell'aria, ed aperti di più i meati dall'acqua, il che non faceva l'aria, scappando i minimi ignei ed incontrando la nostra mano, la penetrano, e noi sentiamo il caldo. 

 

Perché, dunque, ad eccitare il caldo non basta la presenza de gl'ignicoli, ma ci vuol il lor movimento ancora, quindi pare a me che non fusse se non con gran ragione detto, il moto esser causa di calore. Questo è quel movimento per lo quale s'abbruciano le frecce e gli altri legni e si liquefà il piombo e gli altri metalli, mentre i minimi del fuoco, mossi o per se stessi con velocità, o, non bastando la propria forza, cacci`ati da impetuoso vento de' mantici, penetrano tutti i corpi, e di quelli alcuni risolvono in altri minimi ignei volanti, altri in minutissima polvere, ed altri liquefanno e rendono fluidi come acqua. Ma presa questa proposizione nel sentimento commune, sì che mossa una pietra, o un ferro, o legno, ci s'abbia a riscaldare, l'ho ben per una solenne vanità. Ora, la confricazione e stropicciamento di due corpi duri, o col risolverne parte in minimi sottilissimi e volanti, o coll'aprir l'uscita a eTignicoli contenuti, gli riduce finalmente in moto, nel quale incontrando i nostri corpi e per essi penetrando e scorrendo, e sentendo l'anima sensitiva nel lor passaggio i toccamenti, sente quell'affezzione grata o molesta, che noi poi abbiamo nominata caldo, bruciore o scottamento. E forse mentre l'assottigliamento e attrizione resta e si contiene dentro a i minimi quanti, il moto loro è 'temporaneo, e la lor operazione calorifica solamente; che poi arrivando all'ultima ed altissima risoluzione in atomi realmente indivisibili, si crea la luce, di moto o vogliamo dire espansione e diffusione instantanea, e potente per la sua, non so s'io debba dire sottilità, rarità, immaterialità, o pure altra condizion diversa da tutte queste ed innominata, potente, dico, ad ingombrare spazii immensi. 

 

Io non vorrei, Illustrissimo Signore, inavvertentemente ingolfarmi in un oceano infinito, onde io non potessi poi ridurmi in porto; né vorrei, mentre procuro di rimuovere una dubitazione, dar causa al nascerne cento, sì come temo che anco in parte possa essere occorso per questo poco che mi sono scostato da riva: però voglio riserbarmi ad altra occasion più opportuna. 

 

 

Le tort est plutôt du coté de Galilei, qui ne mâche pas ses mots: dans un commentaire écrit par lui à la main en marge de la dernière oeuvre de Grassi, RATIO PONDERUM", Galilei traite ce dernier "messer bue", Monsieur boeuf". Le problème du conflit de Galilei avec la theologie au pouvoir était d'ailleurs tellement purement théologique, que la tête du pouvoir au vatican avec son formalisme juridico-administratif (moulin) ne songeait même pas à consulter ses experts astronomes-théologues, un fait qui fut tout à fait sousestimé par Galilei et ses amis. 

 

REDONDI ("Galileo eretico") avait déduit du document suivant une hypothèse que Galilei, en principe, n'avait pas été condamné à cause de ses positions copernicaines, mais parceque, dans le "Saggiatore" (voir document précédent, auquel se réfère le document suivant), il avait développé des idées dangereuses à l'égard de l'interprétation des qualités du pain et du vin dans le sacrement. Copernicus aurait servi de prétexte pour sauver Galilei du bûcher. Ce serait peut-être demander trop de subtilité à une administration, notemment dans un cas, où le manque de subtilité administrative est de renommée mondiale. Voir aussi la citation d'une lettre de Grassi plus loin (2 septembre 1633), à l'égard des relations Grassi-Galilei. Grassi voulait gagner la confiance et l'estime scientifiques de Galilei, il y a mis un travail très important. On n'élabore pas trois livres d'argumentation intense, si l'on est d'avis que les calomnies et les approches de Maffia seraient plus utile. Déjà Favaro, l'éditeur des oeuvres de Galilei, au début du siècle, avait dit qu'il faudrait exclure que Grassi ait soufflé sur le feu du procès de Galilei. Grassi était beaucoup plus sérieux que Galilei. D'ailleurs Tycho Brahe avait déjà déterminé la distance des comètes de 1577 et de 1585 comme étant beaucoup plus loin que la lune, donc ne pas à considerer comme phénomène atmosphérique terrestre comme stipule Aristote. 

Mais Galilei et Guiducci n'aimaient pas la poésie de Tycho et trouvaient ses arguments faibles. 

 

Le Vatican (1984) avait déja fait examiner le document anonyme suivant: il n'a pas été écrit par Grassi. 

 

Du texte ressort que l'auteur ignore qui a développé l'idée de l'atome en philosophie présocratique: il parle des atomes de Démocrite ou d'Anaxagoras, il ne sait donc pas avec précision que c'était Leucippe / Démocrite, pas Anaxagoras, erreur que Grassi n'aurait pas faite. 

 

En plus, le passage incriminé du "Saggiatore" (voir ci-dessus) est bourré de subjonctifs et de conditionnels, "Je suis assez enclin de croire...", "Je ne veux pas sortir dans une mer, d'où je ne peux plus retourner au port.... ". Et mettre Leucippe et Democrite à l'index?

 

En 1625 l'Essayeur / Saggiatore est officiellement dénoncé, comme livre hérétique, à l'Inquisition. Chargé du jugement, le Père Guevara, général des Teatini, déclare l'oeuvre non-condamnable et l'auteur digne de nombreuses louanges. 

 

Tout compte fait, la battaille de prose (dépourvue d'arguments théologiques) entre Galilei et Grassi porte très largement sur les phénomènes de la chaleur et de la lumière, où la science de l'époque était très mal préparée à l'analyse et l'interprétation, donc les malentendus nombreux programmés n'étonnent pas. 

 

Malgré tout, dans la disputation d'une thèse d'Aristote : "Le mouvement est la cause de la chaleur", Galilei donne ici une amorce de la théorie moderne de la chaleur, vue comme la somme de l'énergie cinétique, de rotation, de vibrations... des particules (atomes / molécules) d'un sousensemble de la matière. Intuitivement, Galilei est très moderne. 

 

 

PARERE DI ANONIMO SUL SAGGIATORE DI GALILEO ACTA ET DOCUMENTA, VOL. EE, FF. 292R-293R

 

Havendoalli giorni passati trascorso il libbro del signor Galileo Galilei intitolato Saggiatore sono arrivato a considerare una dottrina insegnata già da alcuni antichi filosofi, da Aristotele efficacemente rigettata ma dal medesimo signor Galilei rinuovata, et havendola io voluto ragguagliare con la vera et indubitata regola delle dottrine revelate, ho trovato che al lume di quella lucerna, quale per essercitio e merito della nostra fede riluce in luogo caliginoso sì ma che però più sicura e più certamente di qualsivoglia naturale evidenza ci illumina, apparisce falsa, o pure (che io non giudico) molto difficile e pericolosa, di sorte che chi per vera la riceve, non titubi poi nel discorso e nel giuditio di cose più gravi. Però ho pensato di proponerla a Vostra Paternità reverendissima e pregarla, come faccio, a dirmene il suo senso, che servira per mio avvertimento. 

 

Dunque il predetto auttore nel libro citato a fogli 196 linea 29, volendo esplicare quella proposizione spesso proferita da Aristotele in più luoghi il moto è causa di calore, et aggiustarla ad un suo proposito, prende a provare che questi accidenti che communemente si chiamano colore, odore, sapore etc. per la parte del soggetto nel quale si stima communemente si trovino, non siano altro che puri vocaboli, e solamente siano nel corpo sensitivo dell'animale che li sente. Vá esplicando questo con l'essempio del solletico, o vogliamo dire titillatione, cagionata dal toccamento di qualche corpo in certe parti dell'animale, concludendo che come il solletico, quanto all'attione, tolto via il senso dell'animale. non é differente dal tatto e movimento che si farebbe sopra una statua di marmo, ma tutta é nostra affettione, così quegl'accidenti che si apprendono da nostri sensi e si chiamano sapori, odori, colori etc. non sono, dice egli, ne' soggetti ne' quali si stima volgarmente che siano, ma solamente ne nostri sensi, si come la titillatione non è nella mano, n è nella penna che tocca per essempio sotto le piante de piedi, ma solamente nell'organo sensitivo dell'animale. 

 

Ma questo discorso parmi che pecchi in assumere per provato quello che doveria,provare cioè che in ogni caso l'oggetto che si sente sia in noi, per che l'atto che e circa di quello é in noi; ne discorrere bene chi dicesse: la vista, con la quale vedo la luce del sole, è in me, dunque la luce del sole è in me. Ma che che sia di sí fatto progresso, non mi fermo a essaminarlo. 

 

Segue l'autore ad esplicare questa sua dottrina e s'ingegna di dimostrare quello che siano questi accidenti in ragione di oggetto e termine delle nostre attioni, e come si vede a foglio 198 linea 12, comincia ad esplicarli con gl'atomi d'Anassagora o pure di Democrito, quali egli chiama minimi o particelle minime, et in queste dice continuamente si vanno risolvendo i corpi, che però applicati alli nostri sensi, penetrano la nostra sustanza e secondo la diversità de' toccamenti e delle diverse figure di essi minimi, lisci o scabrosi, duri o cedenti, e secondo che sono pochi o molti, ci vanno diversamente pungendo e trapassando con maggiore o minor divisione o con agevolarci il respiro, e per conseguenza con nostra noia o gusto. Al senso del tatto, più materiale e corporeo, convengono dice egli, i minimi della terra; al gusto quelli dell'aqqua, e li chiama fluidi; all'odorato quelli del fuoco, e li chiama ignicoli; all'udito quelli dell'aria; alla vista poi attribuisce la luce della quale dice di sapere pochissimo parlare. Et a foglio 199 linea 25 conclude che per destare in noi i sapori odori etc. non si richiede altro ne corpi che sono communemente saporosi, odoriferí etc. che grandezze, figure, moltitudini e che gl'odorí, sapori, colori etc. non sono altrove che negl'occhi, lingua, nasi etc. di modo che, tolti via questi organi, gl'accidenti predetti non si distinguono dagl'atomi se non nel nome. 

 

Hor se questa filosofia d'accidenti si ammette per vera, mi pare che grandemente difficulti l'esistenza de gl'accidenti del pane e del vino che nel Santissimo Sacramento stanno separati dalla propria sustanza, poiche ritrovandosi ivi i termini e gl'oggetti del tatto, della vista, del gusto etc. , secondo questa dottrina bisognerà dire che anche vi siano le minime particelle con le quali prima la sustanza del pane moveva i nostri sensi, le quali se fossero sustantiali, come diceva Anassagora, et anche pare che consenta quest'autore a foglio 200 linea 28, ne segue che nel Sacramento vi siano parti sustantiali di pane o vino, che e errore condannato dal Sacro Concilio Tridentino, sess. 13 can. 2. 0 veramente, se fossero solamente grandezze, figure, moltitudini etc. , come più chiaramente pare che egli confessi, sentendo con Democrito ne segue,essendo tutti questi accidenti modi, o come altri dicono, formalita di quantita, che quando i Sacri Concilii, e specialmente il Tridentino nel luogo citato, determinano che nel Sacramento doppo la consacrazione rimangono solamente gl'accidenti del pane e del vino, rimarrebbe solamente la quantitá con le figure triangolari, acute, ottuse etc. , e che con questi accidenti soli si salvasse l'assistenza degl'accidenti o specie sensibili: la qual conseguenza non solo mi pare contro tutta la <opinione> commune de teologi che insegnano nel Sacramento rimanere tutti gl'accidenti sensibili del pane e del vino, colore, odore, sapore, e non puri vocaboli; e pure,com'è noto,in buona sentenzanon vi rimane la quantitá della sustanza; ma di diritto repugnante alla verità de' Sacri Concilii, poiché o questi minimi si esplichino con Anassagora o con Democrito, se restano doppo la consacrazione, non meno sarà sustanza di pane un hostia consecrata che una non consecrata, essendo che l'essere sustanza corporea in sentenza di questi consiste in un aggregato di atomi disposti in questa o quella maniera, con questa o quella figura etc. Ma se questi minimi non rimangono, ne segue che niuno accidente di pane rimanga nell'hostia consecrata, poiché altri accidenti non si danno, dice quest'autore a foglio 197 linea 1, che figure, grandezze, movimenti etc. , e questi essendo essercitii di una quantità o sustanza quanta, non é possibile come tutti i filosofi e theologi insegnano, separarli in modo che essistino senza la sustanza o quantità, della quale sono accidenti. 

E questo è quanto mi si rappresenta di difficile in questa dottrina, quale propongo e sottopongo, per quello che tocca il mio giuditio già accennato, a quanto Vostra Paternità reverendissima si compiacerà dirmene: e le fo' reverenza. 

 

 

Galilei, vers 1625/26 se met à l'élaboration de son oeuvre "DIALOGO SOPRA I DUE MASSIMI SISTEMI DEL MONDO, TOLEMAICO E COPERNICANO",projet qu'il portait déjà dans sa tête depuis 1597. L'oeuvre le manoeuvratotalement dans le contrôle de l'inquisition. 

 

Galilei termine le manuscrit début 1630;

Le 16 mars 1630, Benedetto Castelli écrit à Galilei et rapporte l'histoire suivante: Le Père Campanella avait quelques Messieurs allemands sous sa tutelle, disposés à changer de confession et de devenir catholique. Mais quand ils ont appris que Copernicus était à l'index, ils ont changé d'avis. Le Pape URBAIN VIII, en apprenant cette histoire, aurait dit:

 

"Ce n'était jamais notre intention; et si nous avions été saisi de cette affaire, ce decret (Copernicus à l'index) n'aurait jamais été fait. " 

 

Castelli recommande à Galilei de se rendre à Rome, très encouragé par cette position du Pape. 


Le 3 mai 1630Galilei est à Rome (jusqu'au 26 juin), reçu par le Pape, et il lance la procédure pour la publication de son oeuvre. Pour la révision, le manuscrit est transmis au Maître du Palais Sacré,Niccolo Riccardi (élève et ami de Galilei), qui le passe au Père Raffaello Visconti. Ce dernier notifie à Galilei le 16 juin que l'oeuvre plaît à Riccardiet que l'oeuvre sera passé au Pape après avoir remanié "des petites choses": le proemio (voir plus loin) et le titre. Le remaniment du proemio, donc avec le consentement du Maestro del Sacro Palazzo et probablement même du Pape (!), sort entre outre que ".. ce decret ne fut pas le produit d'un examen judicieux mais de passion trop peux informée.. " (voir plus loin le text italien du passage).

D'abord on voulait publier l'oeuvre à Rome, à l'Académie des Lincei. Son président, CESI, était mort. 

 

La revision à Rome (afin de tenir compte des souhaits du Pape) etait difficile avec Galilei loin à Florence. 

 

Le 24 août 1630, Castelli suggère à Galilei que l'impression se fasse à Florence. Il avait parlé avec le Père Visconti, qui n'avait aucune objection et qui voulait que l'oeuvre sera surtout publiée.

Le 24 mai 1631, Riccardi écrit à l'Inquisiteur de Florence que dans le titre, par volonté du Pape, ne devrait pas apparaître les termes flux et reflux (marées), et que la position copernicaine ne devrait pas être présentée comme vérité mais comme pure hypothèse mathématique afin de démontrer que l'on pourrait sauver les apparences.

Le 19 juillet 1631, l'ambassadeur Niccolini transmet à Galilei la correction du proemio (aujourd'hui on ne sait plus distinguer la plume de Riccardi de celle de Galilei).

Le 21 février 1632 l'oeuvre sort de la presse. 

 

 

PROEMIO DU DIALOGO (APRÈS REMANIMENT GALILEI / RICCARDI)

AL DISCRETO LETTORE

 

Si promulgò a gli anni passati in Roma un salutifero editto', che, per ovviare a' pericolosi scandoli dell'età presente, imponeva opportuno silenzio all'opinione Pittagorica della mobilità della Terra. Non mancò chi temerariamente asseri', quel decreto essere stato parto non di giudizioso esame, ma di passione troppo poco informata, e si udirono querele che consultori totalmente inesperti delle osservazioni astronomiche non dovevano con proibizione repentina tarpar l'ale a gl'íntellettí speculativi. Non potè tacer il mio zelo in udir la temerità di sí fatti lamenti. Giudicaí, come pienamente instrutto di quella prudentissima determinazione, comparir publicamente nel teatro del mondo, come testimonio di sincera veríta. Mi trovai allora presente in Roma; ebbi non solo udienze, ma ancora applausi de i píú eminenti prelati di quella Corte; né senza qualche mia antecedente informazione segui poi la publícazíone di quel decreto. Per tanto è mio consiglio nella presente fatica mostrare alle nazioni forestiere, che di questa materia se ne sà tánto in Italia, e particolarmente in Roma, quanto possa mai averne imaginato la diligenza oltramontana; e raccogliendo insieme tutte le speculazioni proprie intorno al sistema Copernicano, far sapere che precedette lanotizia di tutte alla censura romana, e che escono da questo clima non solo i dogmi per la salute dell'aníma, ma ancora gl'ingegnosi trovati per delizie degl'ingegnì… 

(Questo proemio, così come la chiusa del Dialogo, contenente la celebre "medicina del fine" suggerita da Urbano VIII, furono da Galileo concordati col Maestro del Sacro Palazzo. Oggi e impossibile stabilire che cosa si debba a Galileo e che cosa al Riccardi. E tuttavía interessante notare che gran parte delle argomentazioni che vi compaiono erano gia presenti nella lettera a Francesco Ingoli del 1624, una specie di prova generale dei Massimi Sistemi, dei quali anticipava e prefigurava le tesi principali. )



Le DIALOGO de Galilei reçoit donc l'imprimatur des supérieurs, avec la demande de modifier un peu le début et la fin. Le PROEMIO (copie ci-dessus) a été élaboré conjointement par Riccardi et Galilei. On ne sait plus quoi sort de la plume de qui. Riccardi était le suprême censeur du Saint'Office. Mais il était aussi l'élève et l'ami de Galilei. Il est fort fort étonnant qu'avec l'autorisation du Vatican on fait imprîmer:

 

"... ce décret (la mise à l'index de l'oeuvre de Copernicus) a été un produit, non d'un examen judicieux, mais de passion trop peu informée. "Puis l'hierarchie supérieur du Vatican se rend compte que Galilei a passé sous silence le précepte que lui avait fait, en 1616, le Cardinal Bellarmino et le Père Commissaire. 

 

La théologie au Vatican entre dans un état d'ébullition: On confisque tous les exemplaires du DIALOGO, déjà en vente; on insiste que Galilei vienne tout de suite à Rome; il est gravement malade et n'obéit pas tout de suite à l'ordre; on le menace de le faire chercher en chaines à Rome; on envoie des médecins afin de contrôler son état de santé; Riccardi, le chef des censeurs du Vatican va au chomage, il perd sa place. 

 

Dès 1616 le problème n'est pas du toutscientifique, depuis la promesse de Galilei d'obéir à l'église. La documentation ci-après résume très bien et de manière succincte les faits essentiels du procès proprement dit. 

 

L'affaire se joue entre l'ambassadeur de Florence à Rome, Niccolini, d'un coté, et le pape et leCardinal Barberini, de l'autre. On parle d'une intense action diplomatique de Niccolini; le Granduc ne veut plus payer les frais pour le procès et le séjour de Galilei à Rome, et avant le 9 avril 1633 déjà, une dizaine de semaine avant le jugement et l'abjuration, Niccolini avait donné des conseils à Galilei, de ne plus se préoccuper de maintenir ses opinions et de se soumettre à ce quel'église souhaite qu'il croit ou tienne à l'égard de la mobilité de la terre. Ceci pour finir l'affaire plus rapidement. 

 

Galilei en était tellement touché et consterné que Niccolini, le lendemain, avait peur pour la vie de Galilei, du "bon vieux". 

 

Ce fut aussi l'ambassadeur Niccolini à faire la suggestion au Pape de demander à Galilei une "apologie". 

 

La correspondance de Niccolini avec le Ministre Cioli à la cour de Florence pendant le 1er semestre de 1633 y est assez révélante. 

 

 

NOTE DE BAS DE PAGE (FERDINANDO FLORA / RICCIARDI / MILANO 1953; P. 1060)

 

1.  Après une longue attente et suite à une intense activité déplomatique de Niccolini, finalement le 12 avril Galileo avait été interrogé mais il n'avait pu revenir chez l'ambassadeur. Retenu dans le Palais du Saint Office, il écrivait que" bien que sous l'habituelle et étroite surveillance", on avait commencé à traiter son "cas" pourla poursuite duquel "il est convenu que je reste retiré, bien qu'avec des égards et un confort inhabituels, dans 3 chambres, qui sont une partie de celles habitées par le S. Fiscale du Saint Office, avec une grande liberté pour me promener dans de vastes espaces. Ma santé est bonne grâce à Dieu et grâce à l'exquise courtoisie de Mr l'Ambassadeur et Mme l'Ambassadrice qui me procurent toutes les commodités en abondance". 

     Niccolini lui avait donné des conseils dont il fait part à Cioli en date du 9 avril. Galileo "prétend défendre convenablement ses opinions, mais je l'ai exhorté, pour en finir rapidement, à ne pas se soucier de les soutenir et à se soumettre à ce que les gens veulent croire pour ce qui concerne le mouvement de la Terre. Il s'est senti très affligé et depuis hier je l'ai vu si bas que je crains fort pour sa vie. On mettra un serviteur à sa disposition et d'autres facilités et nous ne manquerons pas de le consoler et de l'aider avec des amis et ceux qui participent aux délibérations parce qu'il mérite notre bienveillance et toute la maison qui l'aime infiniment ressent une peine immense". 

 

2.  Commissaire : le Dominicain Vincenzo Maculano di Fiorenzuola (1578-1667), vicaire général de son ordre, commissaire du Saint Office, par la suite cardinal et évêque de Benevento. Il fut également un architecte militaire renommé (fortifications de Malte, de Bologne, restauration du Castel Sant'Angelo, etc…). 

     Quand Galilée se présenta à lui le matin du 12 avril, il "le reçut avec des démonstrations d'affection et lui fit attribuer non pas les chambres ou cachots destinés aux délinquants mais celles du Fiscale de ce tribunal" (cf lettre de Niccolini à Cioli du 16 avril). Le père Maculano avec son tact contribua grandement à pousser le terrible tribunal à une relative clémence. Après l'interrogatoire du 12 avril, comme Galileo avait soutenu n'être pas coupable, il fallait avoir recours à l'"examen rigoureux" c'est-à-dire à la torture. Le père Maculano, suivant une procédure tout à fait insolite, obtint de la Congrégation que "Galilée soit traité de façon non judiciaire afin de le rendre conscient de son erreur et de l'amener, quand il en aurait pris conscience, à le confesser". 

     Le 27 avril, après le repas, il se mit à "discuter avec Galilée et après de nombreux arguments et réponses", il atteignit son but "grâce au Seigneur". Et content il en fit part au Cardinal Barberini : "je lui ai fait toucher du doigt son erreur de façon qu'il reconnaisse clairement s'être trompé et avoir exagéré dans son livre, ce qu'il exprima avec des paroles pleines de sentiments comme s'il était consolé d'avoir pris conscience de son erreur et il se prépara à le confesser au tribunal". De cette façon, la réputation du tribunal était sauve et "il sera possible de traiter le coupable avec bienveillance" (cf la lettre de Maculano à Francesco Barberini, du 28 avril 1633). 

     Galilée "confessa" le 30 avril et fut renvoyé chez l'Ambassadeur lequel, le 1er mai, en fit part à Cioli : "Mr Galilée fut renvoyé chez moi hier alors que je l'attendais le moins... et ce grâce aux bons offices du Commissaire et du Cardinal Barberini qui de lui-même, sans la Congrégation, l'a fait libérer, pour qu'il puisse se remettre de ses désagréments et habituelles indispositions qui toujours le perturbaient". Et il semblait que, suivant le désir du Père Maculano, il ne serait plus donné suite au procès. 

     Et pourtant, Galilée fut encore interrogé le 10 mai ; à la fin du mois, il lui fut concédé grâce aux bons offices du Père Maculano, de prendre l'air dans les jardins "mais dans un carrosse mi-fermé" ; le 20 juin au soir, il fut appelé au Saint Office "où il se rendit le mardi matin (21 juin) comme il en avait reçu l'ordre, pour voir ce que l'on attendait de lui. 

     Comme il avait été retenu, il fut conduit le mercredi à la Minerva devant Messieurs les cardinaux et prélats de la Congrégation où non seulement on lui lut la sentence mais où une fois encore on le fit abjurer son opinion". 

     Et Niccolini, quand il en fit part à Cioli le 26 juin, ajoute :

     "La sentence stipule la prohibition de son livre et de plus sa propre condamnation aux prisons du Saint Office suivant le bon vouloir de Sa Sainteté... laquelle condamnation fut tout de suite muée, par sa béatitude, en un séjour dans le jardin de Trinita dei Monti où je l'amenai vendredi soir et où il se trouve maintenant dans l'attente de la clémence de Sa Sainteté". 

 

 

Voici, avec la "sentenza" et "l'abiura" (l'apologie de Niccolini) la conclusion. Le jugement fut prononcé au nom de dix cardinaux. Trois ne l'ont pas signé. A Galilei on fait le compliment à double sens, qu'il a répondu "en bon catholique". 

 

Sans pitié chrétienne, encore jusque longtems après la mort de Galilei, et de manière archi-humiliante, sans compréhension des faits de l'univers, dans l'ignorance la plus totale de l'immensité de la farce qu'ils allaient mettre en scène, les très éminents cardinaux obligent Galilei de se mettre à genoux et de jurer sur leur vérité absolue. 

 

 

SENTENCE. ROME, 22 JUIN 1633 -

 

Nous Gapsard del tit. di S. Croce in Gerusalemme Borgia; 

Frère Felice Centino del tit. di S. Anastasia, dit d'Ascoli;

Guido del tit. di S. Maria del Popolo Bentivoglio;

Frère Desiderio Scaglia del tit. di S. Carlo, dit de Cremone;

Frère Ant. o Barberino, dit S. Onofrio;

Laudivio Zacchia, del tit. di S. Pietro in Vincolo, dit de S. Sisto;

Berlingero del tit. di S. Agostino Gesso;

Fabricio del tit. di S. Lorenzo in Pane et Perna Verospio, appelés Prêtres;

Francesco del tit. di S. Lorenzo in Damaso Barberino;

Marzio di Santa Maria Nova Ginetto: diacres;

     

par la miséricorde de Dieu, Cardinaux de la Sainte Eglise romaine, dans toute la république chrétienne, Inquisiteurs généraux contre les hérétiques, députés spéciaux de la 5e séance apostolique;

     

Etant donné que toi, Galilée, fils de Vinc. Galileo, Florentin, âgé de 70 ans, tu fus dénoncé en 1615 par ce Saint Office, pour tenir vraie la fausse doctrine, enseignée par certains, qui soutient que le Soleil soit le centre du monde et immobile et que la Terre se meut d'un mouvement diurne ; que tu avais des disciples auxquels tu enseignais cette même doctrine, que sur elle tu tenais une correspondance avec quelques mathématiciens d'Allemagne, que tu avais fait éditer certains lettres sur les Taches solaires, dans lesquelles tu exposais cette doctrine comme vraie ; qu'aux objections qu'on te faisait parfois, basées sur les Saintes Ecritures, tu répondais en critiquant ces Ecritures et en les interprétant à ta façon ; et qu'ensuite fut présentée une copie d'une lettre envoyée par toi à l'un de tes disciples et dans cette lettre, suivant la conception de Copernic, on trouve diverses propositions allant contre le sens réel et l'autorité de la Sainte Ecriture ;

Dans le but de pourvoir au désordre et aux dommages provoqués par tout ceci, désordre et dommages toujours croissants au préjudice de la Foi, sur l'ordre de Notre Seigneur et des éminents et révérends Cardinaux de cette suprême et universelle Inquisition, deux propositions sur la stabilité et le mouvement de la terre ont été faits par les Théologiens, à savoir :

 

• que le Soleil soit le centre du monde et immobile est une proposition absurde et fausse en philosophie et formellement hérétique puisqu'expressément en contradiction avec la Sainte Ecriture ;
     

• que la Terre ne soit pas le centre du monde ni immobile mais qu'elle bouge d'un mouvement diurne, est de même une proposition absurde et fausse en philosophie et considérée en théologie "ad minus erronea in Fide ". 


Nous avons voulu agir envers toi avec bienveillance et dans cette Congrégation sacrée en date du 25 février 1616, il fut décrété que l'Eminent Cardinal Bellarmino devait t'ordonner de considérer comme fausse ladite opinion et, dans le cas d'un refus de ta part, le Commissaire du Saint Office devait te signifier de quitter ladite doctrine et que tu ne pouvais l'enseigner à d'autres ni la défendre, ni en discuter ; si tu ne te pliais pas à cet ordre, tu devais être emprisonné ; en exécution de ce décret, le jour suivant et en présence du sus-nommé Cardinal Bellarmino, après que le Cardinal ait été prévenu et mis au courant, le Commissaire du Saint Office te signifia devant le notaire et les témoins que tu devais laisser tomber totalement ladite opinion fausse et qu'à l'avenir tu ne pouvais ni la défendre, ni l'enseigner en aucune façon ni oralement ni par écrit ; comme tu as promis d'obéir, tu as été relâché. Et afin que cette doctrine si pernicieuse disparaisse totalement, et ne se répande plus au grand préjudice de la vérité catholique, un décret fut signé par la Saint Congrégation de l'Index par lequel les livres qui traitent de cette doctrine furent défendus et cette doctrine déclarée fausse et totalement contraire à la sainte et divine Ecriture

 

Comme ici dernièrement un livre est apparu, imprimé à Florence l'an passé, livre dont tu es l'auteur, intitulé "Dialogue de Galileo Galilei sur les deux plus importants systèmes du monde, celui de Ptolémée et celui de Copernic". 

 

La Sainte Congrégation apprit que par la diffusion de ce livre, la fausse opinion sur le mouvement de la Terre et l'immobilité du Soleil se répandait rapidement. Ce livre fut soigneusement pris en considération et l'on y trouva la transgression de l'ordre que tu avaix reçu puisque dans ce livre tu défendais ladite opinion déjà condamnée devant toi. Dans ce livre, de façon détournée, tu considères ladite opinion comme indécise et tout à fait probable. C'est une grave erreur, étant donné qu'en aucune façon une opinion déclarée contraire à l'Ecriture divine ne peut être probable. 

 

C'est pourquoi sur notre ordre tu as été convoqué dans ce Saint Office, dans lequel, sur la foi du serment, tu reconnus ce licre comme tien et remis par toi à l'imprimeur. Tu confessas qu'il y a 10 ou 12 ans, tu commenças à écrire ce livre, alors que tu avaix déjà reçu l'ordre dont il est question ci-dessus ; que tu demandas la permission de l'imprimer sans pour autant signaler à ceux qui te donnèrent cette permission que tu avais reçu l'ordre de ne pas défendre ou enseigner en aucune façon cette doctrine. 

 

Tu confessas également que l'écriture de ce livre se présente sous une forme telle que le lecteur puisse se rendre compte que les arguments présentés comme faux soient prononcés pour être considérés comme tels, en t'excusant d'avoir commis une erreur tellement éloignée de ton intention. Comme tu as écrit sous forme de dialogues, de façon à ce que chacun puisse trouver les détails les plus pertinents et se montrer le plus fin de tous pour trouver les propositions fausses et les probabilités. 

 

Un délai t'a été accordé pour préparer ta défense et tu as produit un document écrit de la main de l'éminent Cardinal Bellarmino que tu t'es procuré pour te défendre des calomnies de tes ennemis qui affirmaient que tu avaix abjuré et que le Saint Office t'avait puni. 

Dans ce document, il est indiqué que tu n'as pas abjuré ni même que tu aies subi une punition, mais que la déclaration faite par Notre Seigneur et publiée par la Sainte Congrégation de l'Index t'a été signifiée. Cette déclaration dit que la doctrine du mouvement de la Terre et de l'immobilité du Soleil est contraire aux Saintes Ecritures et dès lors n'est ni crédible ni défendable. 

 

Il n'est nullement fait mention dans ce document des deux aspects de l'ordre, à savoir "enseigner"et "en aucune façon ". Il faut croire qu'au cours de ces 14 ou 16 ans, tu les avais complètement oubliés et que pour cette même raison, tu n'as pas fait mention de l'ordre reçu quand tu as demandé la permission de remettre ton livre à l'imprimeur. Tu nous as dit tout ceci non pour excuser l'erreur commise mais pour l'attribuer à une vaine ambition plutôt qu'à la malignité. Mais ce document produit par toi pour ta défense joua plutôt en ta défaveur puisqu'il y est dit que ladite opinion est contraire aux Saintes Ecritures et que malgré cela, tu en as traité, tu l'as défendue et présentée comme probable. De même, tu as extorqué de façon trompeuse la permission d'imprimer puisque tu n'as pas fait mention de l'ordre que tu avais reçu. 

 

Il nous a semblé que tu n'avais pas dit toute la vérité sur tes intentions, nous avons pensé t'appliquer la torture. Sous la torture, sans porter préjudice en aucune façon aux éléments que tu as confessés et retenus contre toi, tu as répondu catholiquement. 

Dès lors, vus et considérés les mérites de ta cause, avec tes confessions et excuses, et tout ce que la raison nous a fait prendre en considération, nous avons émis contre toi une sentence définitive, reprise ci-dessous. 

 

Nous invoquons le saint nom de notre Seigneur Jésus-Christ et de sa très glorieuse Mère Marie toujours vierge. 

 

Pour cette sentence définitive, d'une part, sous le conseil et l'avis des Maîtres de Théologie sacrée et Docteurs de l'une et l'autre lois, nos consultants, Mr Carlo Sinceri, docteur de l'une et l'autre lois, Procurateur Fiscal de ce Saint office et, d'autre part, Galileo Galilei, susnommé, coupable ici présent, soumis à l'Inquisition, ayant subi un procès et t'étant confessé, nous disons, prononçons et déclarons que toi, Galilée, susnommé, pour les choses déduites du procès et confessées par toi ci-dessus, tu t'es rendu à ce Saint Office suspecté d'hérésie, c'est-à-dire coupable d'avoir soutenu et cru une doctrine fausse et contraire aux Saintes Ecritures, que le Soleil soit le centre de la Terre et ne se meuve pas d'orient à occident et que la Terre bouge et ne soit plus le centre du monde, que l'on puisse soutenir et défendre une opinion après qu'elle eût été déclarée contraire aux Saintes Ecritures ; et que, par conséquent, tu sois allé à l'encontre des saints canons et autres constitutions générales et particulières.
 

Nous sommes contents que tu reçoives l'absolution pour autant que d'abord, avec un coeur sincère et une foi non feinte, tu abjures devant nous, que tu maudisses et détestes les erreurs et hérésies sus-mentionnées et toute autre erreur ou hérésie contraire à l'Eglise Catholique et Apostolique, sous la forme et de la façon que nous te préciserons. 

Et enfin que cette grave et pernicieuse erreur ne reste pas tout à fait impunie, et que tu sois plus prudent à l'avenir et afin que cela serve d'exemple à d'autres pour qu'ils s'abstiennent de semblables délits, nous ordonnons que le livre sur "Les dialogues de Galileo Galilei"soit interdit par édit public. 

 

Nous te condamnons à la prison formelle selon notre arbitre ; et comme pénitence pour ton salut nous t'imposons de dire pendant 3 ans une fois par semaine les 7 Psaumes de pénitence ; nous nous réservons la possibilité de modifier, modérer ou supprimer totalement ou en partie, les susdites peines et pénitences. 

 

Ainsi nous disons, prononçons, déclarons, ordonnons de cette façon et de toute autre façon que nous jugerions utile. 

 

Ainsi nous prononçons les soussignés

 

E. Cardinalis de Asculo                   B. Cardinalis Gipsius

G. Cardinalis Bentivolus                 F. Cardinalis Verospius

Fr. D. Cardinalis de Cremona        M. Cardinalis Ginettus

Fr. Ant. s Cardinalis S. Honupri



ABJURATION

 

Moi Galilée, fils de Vincent Galileo de Florence, âgé de 70 ans, m'étant présenté devant la justice et à genoux devant vous, Eminents Cardinaux, Inquisiteurs généraux contre les hérétiques dans toute la république chrétienne, ayant sous les yeux les Saints Evangiles, que je touche des mains, je jure avoir toujours cru, croire maintenant et avec l'aide de Dieu croire à l'avenir tout ce que soutient, prêche et enseigne la Saint Eglise catholique et apostolique. J'avais reçu l'ordre de ce Saint Office, et cet ordre m'avait été donné juridiquement, de laisser totalement tomber la fausse opinion que le Soleil est le centre du monde et immobile et que la Terre n'est pas le centre du monde et se meut. Je ne pouvais ni soutenir, ni défendre ni enseigner cette fausse doctrine. Il m'a été signifié que cette doctrine était contraire à la Sainte Ecriture et malgré tout cela, j'ai écrit et remis à l'imprimeur un livre dont le sujet est cette doctrine déjà condamnée et je fournis des arguments très efficaces en sa faveur, sans apporter aucune solution. Dès lors j'ai été suspecté d'hérésie puisque j'ai soutenu et cru que le Soleil était le centre du monde et immobile et que la Terre n'était pas le centre du monde et se mouvait. Dès lors puisque je veux lever ce soupçon conçu à mon sujet de l'esprit de vos éminences et de tout fidèle chrétien, avec un coeur sincère et une foi non feinte, j'abjure, je maudis et déteste les erreurs et hérésies en question et d'une façon générale toute autre erreur, hérésie et secte contraire à la Sainte Eglise ; et je jure qu'à l'avenir je ne dirai plus jamais ni n'affirmerai, ni par écrit ni oralement, de choses qui pourraient jeter sur moi un semblable soupçon ; et si je fais la connaissance d'un hérétique ou de quelqu'un qui soit soupçonné d'hérésie, je le dénoncerai à ce Saint Office ou à l'Inquisiteur ou préposé de l'endroit où je me trouverai. 

 

Je jure également et promets d'obéir et observer entièrement toutes les pénitences qui m'ont été ou me seront imposées par ce Saint Office ; et si je devais ne pas tenir l'une de mes promesses ou jurements, grâce à Dieu souhaitons que cela n'arrive pas, je me soumets à toutes les peines et punitions qui sont imposées à des délinquants de cette sorte par les sacrés canons et autres constitutions générales. 

 

Qu'il en soit ainsi avec l'aide de Dieu et de ces Saints Evangiles, que je touche des mains. 

 

Moi Galileo Galilei j'ai abjuré, juré et promis comme indiqué ci-dessus ; en foi de quoi j'ai signé de ma propre main ce document ce mon abjuration et j'en ai lu chaque parole à voix haute, dans le Couvent de Minerva ce 22 juin 1633. 

 

Moi, Galileo Galilei, j'ai abjuré comme il est indiqué ci-dessus.

 

Le 2 septembre 1633, le Père Grassi, chef des mathématiciens du Collegio romano, exprime son opinion à l'égard du procès de Galilei comme suit:

 

 

REVUE D'HISTOIRE DES SCIENCES. TOME XLV-2/3-AVRIL-SEPTEMBRE 1992 -

ETUDES SUR GALILEI, 200 PIERRE-NOËL MAYAUD

 

Pour conclure, il importe enfin de citer un extrait de cette lettre de Grassi envoyée de Savone, le 2 septembre 1633 (l'abjuration est du 22 juin), à un prêtre gênois, professeur de philosophie, et à laquelle Redondi fait allusion (p. 290) : 

 

Quant aux ennuis (disgusti) de Galilei, je vous dis très sincèrement que j'en ai ressenti un très grand déplaisir (despiacere) parce ce que je lui ai toujours porté beaucoup plus d'affection qu'il n'a daigné en porter envers moi; et ayant été interrogé à Rome l'an dernier à propos de son livre concernant le mouvement de la Terre et l'opinion que j'en avais, j'essayais par tous les moyens d'apaiser les esprits irrités (inaspriti) contre lui,et de les rendre capables de comprendre l'efficacité des arguments apportés par lui, si bien que certains s'étonnèrent comment moi, estimé selon eux offensé par Galilei, et peut-être peu apprécié, je parlais pour lui avec tant d'empressement. Mais il s'est ruiné lui-même en s'entichant de sa propre intelligence etn'ayant aucune estime pour les autres. Et ainsi qu'il ne s'étonne pas si tous con-spirent à son détriment. 

 

Le jugement sur l'homme est dur, mais Galilei effectivement n'était pas tendre, même à l'égard de Kepler (63). Que penser de ce qui précède ce jugement? Favaro, lorsqu'il publie cette lettre pour la première fois, en 1892 (64), commente en disant : 

 

"Que Grassi puisse être accusé d'avoir soufflé sur le feu doit être exclu." 

Nous ajouterions: rièn non plus ne transpire d'un lien quelconque avec l'Eucharistie, et, dans cette lettre privée, n'est-il pas significatif que Grassi, qui, dans le passage eucharistique de sa Ratio, avait évoqué le problème du mouvement de la Terre, ne précise pas ici à son correspondant que, finalement, ce n'était pas cela qui était en jeu dans les "digusti"de Galilée mais cette incompatibilité entre sa théorie des sensations et la doctrine eucharistique?Si la thèse de Redondi avait un fondement, on s'attendrait en vérité à ce qu'il manifeste une certaine satisfaction de ce qu'il pourrait croire avoir été une lucidité de sa part; or rien n'en apparaît. 

 

(63) Citons cette lettre à Micanzio, du 19 novembre 1634, où il affirme que, entre lui et Kepler, "une rencontre se vérifiera a peine une fois sur cent ". Et faut-il rappeler que Descartes n'était guère plus tendre à l'égard de Galilée... ?

 

(64) A. Favaro, Galileo Galilei e il P. Orazio Grassi, Glornale Ligustico, XIX (1892), fasc. III-IV, 1-28. 

 

 

Bien sur, l'erreur est humaine, depuis Cato l'ancien (errare humanum est), mais que la léthargie des théologues catholiques à Rome a besoin de 200 années, afin de comprendre les faits de l'univers dans le système solaire et d'enlever l'oeuvre de Galilei de l'index (1835), est d'une pauvreté intellectuelle exemplaire, absence d'esprit critique, manque d'honnèteté, hypocrisie. 

 

 

L'affaire Galilei: 

 

Un compromis politique pourri, entre la diplomatie de Florence (le Granduc faisait des économies) et le Vatican, qui a pu sauver sa face, qui avait maintenant un exemple à statuer, une digue à ériger contre la pensée et la force émancipatoires de la science, contre un savoir plus solide, plus fiable, saute sur une occasion trop facile, trop imbécile pour voir le piège que tend l'histoire. 

 

A près d'une centaine d'inquisiteurs et de nonces du vatican, à travers toute l'Europe, furent envoyés des copies du jugement et de l'abiura, avec l'ordre de les faire porter à la connaissance des professeurs de mathématique et d'astronomie, afin de les intimider massivement. Les adressés rapportent minutieusement: ci-après le rapport du nonce de Flandre au cardinal Barberini, indiquant qu'il avait écrit aux universités de Louvain et de Douai. 

 

 

LE NONCE DE FLANDRE AU CARDINAL ANTONIO BARBERINO. BRUXELLES, LE 6 SEPTEMBRE 1633 -

 

Très éminent et révérend père,

 

J'ai pris connaissance grâce à vos lettres du 2 juillet de ce qui concerne la fausse opinion de Galileo Galilei, que la Terre se meut et que le Soleil reste immobile. J'ai pris connaissance également de l'abjuration faite par celui qui était hautement soupçonné d'hérésie et pour obéir à l'ordre de Votre Eminence, j'ai diffusé l'information ici aux professeurs de philosophie et de mathématique et j'ai écrit aux Universités de Louvain et Douai, afin que chacun laisse tomber cette opinion, s'il la soutenait, et se conforme aux ordres de ce Saint Office. Je termine cette lettre avec une humble révérence à Votre Eminence. 

 

Très humble et dévoué serviteur

Fabio, Archevêque de Consa

 

Monsieur le Cardinal Santo Onofriof

Bruxelles, de Monseigneur le Nonce du 6 septembre au 9 octobre 1633

 

 

Il a fait part à tous les professeurs de mathématique et philosophie de la fausse opinion de Galileo et a de plus écrit aux Universités de Louvain et Douai. 

 

Pour terminer, quelques documents témoignants de la misère humaine de Galilei pour la fin de sa vie: deux lettres qui vont à Paris et oû Galilei peut un peu se défouler plus librement; un échange de lettres afin de permettre à Galilei la consultation d'un médecin en ville, et deux lettres à son disciple, collaborateur scientifique et plus proche ami, Benedetto Castelli. 

 

 

A ELIA DEODATI, A PARISARCETRI, 7 MARS 1634.

 

J'en viens maintenant à votre lettre; et puisque vous me demandez à plusieurs reprises de vous donner des détails sur mes tribulations passées, je ne puis que vous dire en bref que, du jour où j'ai été appelé à Rome jusqu'à présent, je me suis trouvé, grâce à Dieu, en meilleur état de santé que depuis bien des années. A Rome, j'ai été retenu en prison cinq mois; ma prison n'était autre que la maison de l'ambassadeur de Toscane. J'y fus reçu et traité de façon telle par lui et par madame son épouse que leurs propres parents n'auraient pu être l'objet d'une plus grande affection. Ma cause expédiée, je restai condamné à l'emprisonnement, à la discrétion de Sa Sainteté, et on m'assigna pour résidence le palais et le jardin du grandduc à la Trinité des Monts; mais quelques jours plus tard, on me transféra à Sienne, dans la maison de Monseigneur l'archevêque, où je demeurai également cinq mois; j'y fus paternellement accueilli par Sa Seigneurie Illnie, et j'y reçus de fréquentes visites de lit noblesse de la ville; j'y composai un traité sur un sujet nouveau, en matière de mécanique, plein de spéculations curieuses et utiles. De Sienne, il me fut permis de m'en retourner à ma villa, où je me trouve encore, avec interdiction de descendre en ville; cette défense m'a été faite pour me tenir éloigné de la Cour et des princes. Mais quand je suis rentré à ma villa, la Cour était à Pise; le grand-duc est venu à Florence et, deux jours après son arrivée, il m'envoya un estafier pour m'aviser qu'il était en route pour venir me rendre visite. Une demi-heure après, il arrivait, accompagné d'un seul gentilhomme, dans une petite voiture; il descendit chez moi et s'entretint avec moi, dans ma chambre, avec une extrême gentillesse, guère moins de deux heures. Puis donc que je n'ai pas eu à souffrir dans les deux choses que nous devons estimer plus que toutes les autres, je veux dire la vie et la bonne renommée (quant à cette dernière, l'affection redoublée de mes patrons et de tous mes amis me rassure pleinement), les torts et les injustices que la malignité et l'envie ont machinés contre moi ne m'ont point affligé et ne m'affligent point. Bien plus : la vie et l'honneur étant saufs, la grandeur de l'injure me devient plutôt un soulagement; elle est comme une sorte de vengeance, et l'infamie retombe sur les traîtres et sur ceux qui sont établis au suprême degré de l'ignorance, mère de la malice, de l'envie, de la rage et de tous autres vices et péchés pleins de scélératesse et de laideur. Il faut que les amis lointains se satisfassent de ces généralités car les détails sont bien trop nombreux pour pouvoir être contenus dans une lettre. Que V. S. s'en contente, qu'Elle se tranquillise et se console à la pensée que je suis encore en état de mettre au net mes autres travaux et de les publier. 

 

L'avis que V. S. reçoit de Strasbourg m'a fait grand plaisir et je suis sensible à l'honneur de votre intercession et de votre infatigable vigilance. J'eusse aimé que mon Dialogue fût arrivé à Louvain, entre les mains de Froidmont qui, parmi les philosophes non mathématiciens, me paraît des moins endurcis. A Venise, un certain D. Antonio Rocco a fait imprimer une défense des préceptes d'Aristote contre les objections que je lui oppose dans mon Dialogue; c'est un pur péripatéticien, très éloigné de comprendre quoi que ce soit aux mathématiques et à l'astronomie, plein d'âcreté et prompt à l'outrage. J'apprend qu'un autre Jésuite a publié à Rome un livre tendant à prouvcr que la proposition du mouvement de la Tcrrc est absolument hérétique; mais je ne l'ai pas encore vu. 


 
A ELIA DEODATI, A PARISARCETRI, 25 JUILLET 1634 -

Très illustre Seigneur et très honoré patron,

 

J'espère que mes tribulations passées et présentes, et celles aussi dont l'avenir me menace, me feront excuser par vous et par mes autres amis et patrons de là-bas d'avoir tardé à répondre à vos lettres et, quant à eux, de mon complet silence, s'ils peuvent être, grâce à vous, mis au courant de la funcste direction qu'ont prises mes affaires ces temps derniers. 

 

Aux termes de la sentence prononcée à Rome, j'ai été condamné par le Saint Office à l'emprisonnement, à la discrétion de Sa Sainteté, à laquelle il plut de me donner pour prison le palais et le jardin du grand-duc, à la Trinité des Monts; ceci eut lieu l'an dernier au mois de juin, et l'idée me vint alors que, passé ce mois et le suivant, si je demandais la grâce de ma totale libération, je l'obtiendrais, pour n'avoir pas (contraint par la saison) à demeurer là tout l'été et une partie de l'automne. On m'accorda mon transfert à Sienne, où la maison de l'archevêque me fut assignée pour résidence. J'y demeurai cinq mois, au bout desquels on me donna pour prison cette petite maison de campagne située à un mille de Florence, avec interdiction rigoureuse de descendre en ville, de convier mes amis et de les réunir en nombre pour m'entretenir avec eux. Je menais là une vie paisible et faisais de fréquentes visites à un monastère voisin où j'avais deux filles religieuses que j'aimais beaucoup, en particulier l'aînée, femme d'une nature exquise, d'une singulière bonté et qui m'était très affectionnée. Or, celle-ci, par suite d'une accumulation d'humeurs mélancoliques survenue au temps de mon absence qu'elle croyait être pour moi un temps de pénibles épreuves, finit par contracter une dysenterie galopante et mourut en six jours, à l'âge de trente-quatre ans, me laissant dans une affliction profonde qu'une autre circonstance sinistre redoubla : comme je revenais du couvent en compagnie du médecin dont ma fille malade et presque sur le point d'expirer avait reçu la visite, il me dit que le cas était tout à fait désespéré et qu'elle ne passerait pas le jour suivant, ce qui se vérifia; arrivé à la maison, j'y trouvai le vicaire de l'inquisiteur venu pour me signifier - suivant un ordre du Saint Office de Rome qu'il avait reçu en même temps qu'une lettre du cardinal Barberini - que je devais m'abstenir désormais de faire demander pour moi la permission de retourner à Florence, et qu'autrement on me ferait revenir à Rome, dans les vraies prisons du Saint Office. Telle fut la réponse donnée au mémoire que S. E. l'ambassadeur de Toscane, neuf mois après ma condamnation, avait présenté audit tribunal. D'une telle réponse, il me semble qu'on peut tirer la conjecture très probable que je ne quitterai la prison où je suis que pour une autre, commune, étroite, et de longue durée. 

 

Ces faits et d'autres qu'il serait trop long de vous décrire font assez voir que sans cesse va s'exacerbant la rage de mes très puissants persécuteurs, lesquels ont fini par se désigner eux-mêmes : un de mes chers amis [Fulgenzio Micanzio] se trouvait à Rome, il y a environ deux mois, en conversation avec le P. Christophe Gremberger, jésuite, mathématicien du Collège Romain; ils en vinrent à parler de ma condition présente et le jésuite dit à mon ami en propres termes : "Si Galilée avait su conserver l'affection des Pères de ce collège, il mènerait en ce monde une vie glorieuse, aucune disgrâce ne l'aurait frappé et il aurait pu écrire tout à son aise sur n'importe quel sujet, même sur le mouvement de la terre, etc.". V. S. voit donc bien que ce qui a fait et fait mon malheur, ce n'est pas d'avoir professé telle ou telle autre opinion, mais d'avoir encouru la disgrâce des jésuites. 

 

De la vigilance de mes persécuteurs, j'ai eu plusieurs autres preuves. Entre autres celle-ci: une lettre me fut adressée par je ne sais qui des pays ultramontains et envoyée à Rome, où celui qui m'écrivait devait croire que je me trouvais encore; elle fut interceptée et remise entre les mains du cardinal Barberini; et d'après ce qui me fut écrit de Rome par la suite, cette lettre qui, pour mon bonheur, était une première lettre et non pas une réponse, contenait de grands éloges de mon Dialogue. Elle a été lue par plusieurs personnes; j'apprends que des copies en circulent à Rome et on me laisse entendre que je pourrai la voir. A tout cela s'ajoutent d'autres soucis et nombre d'indispositions corporelles qui, étant donné mon âge plus que septuagénaire, pèsent sur moi de telle sorte que la moindre fatigue m'épuise et m'affecte gravement. C'est pourquoi il convient que mes amis aient compassion de moi et me pardonnent un manquement qui prend aspect de négligence mais qui n'est en réalité qu'impuissance; et il faut que V. S. , qui est au premier rang de mes partisans, m'aide à conserver les bonnes grâces de ceux qui, là-bas, me sont favorables, et en particulier du sr Gassendi que j'aime et révère tant. Vous pourrez lui faire part de cette lettre :

 

il m'en a adressé une, pleine de son habituelle bonté, pour me demander de mes nouvelles. Faites-moi aussi la grâce de lui faire savoir que j'ai reçu avec un singulier plaisir la dissertation du sr Martin Hortensius et que, s'il plaît à Dieu d'alléger quelque peu le fardeau de mes peines, je ne manquerai pas de répondre à son aimable lettre. En même temps que celle-ci, V. S. recevra les verres de télescope que m'a demandés le même sr Gassendi pour son usage et pour celui d'autres personnes désireuses de faire quelques observations célestes. V. S. pourra les lui envoyer en lui indiquant que le tube, je veux dire la distance d'un verre à l'autre, doit avoir la longueur de la ficelle que j'ai enroulée autour, un peu plus ou un peu moins selon la vue de la personne qui aura à s'en servir. 

Bérigard et Chiaromonti, tous deux lecteurs à Pise, ont écrit contre moi, celui-ci pour sa défense, celui-là contre son gré, à ce qu'il dit, mais pour complaire à quelqu'un qui peut favoriser sa carrière; l'un et l'autre, d'ailleurs, assez mollement. Mais ce qui me paraît digne de remarque, c'est que certains, voyant s'ouvrir devant eux comme un vaste champ la possibilité de mettre en oeuvre la flatterie au bénéfice de leurs intérêts, se sont laissés entraîner à écrire des choses qui, en dehors des circonstances présentes, seraient facilement tenues pour excessives, sinon téméraires. Froidmont s'était borné à plonger presque jusqu'à la bouche le mouvement de la Terre dans l'hérésie. Mais dernièrement, un Père jésuite a imprimé à Rome que cette doctrine était si horrible, si pernicieuse, si scandaleuse que, même s'il arrive que du haut des chaires, dans les assemblées, dans les débats publics ou par les presses, on présente des arguments contre les principaux articles de la foi, comme l'immortalité de l'âme, la création, l'incarnation, etc. , on ne doit jamais permettre qu'il soit argumenté contre l'immobilité terrestre; ce seul article doit être tenu, sur tous les autres, pour tellement assuré qu'il ne doit, en aucun cas, faire l'objet d'une discussion, n'eût-on même en vue en soutenant une opinion contraire que de le corroborer. Le titre de ce livre est Melchioris Inchofer, e Societate Iesu, Tractatus syllepticus. Voici encore Antonio Rocco qui, en termes peu civils, prend contre moi la défense de la doctrine péripatéticienne, se déclarant lui-même dénué de connaissances mathématiques et astronomiques; c'est un cerveau stupide, sans nulle intelligence de ce que j'écris, mais arrogant et téméraire au possible. A tous ces adversaires, qui sont nombreux, j'ai l'intention de répondre; mais comme l'examen de tous leurs vains discours, pris un à un, serait une entreprise très longue et de médiocre utilité, je pense faire un livre des notes que j'ai écrites en marge de leurs ouvrages sur les points les plus essentiels et sur les erreurs les plus lourdes; et je les publierai comme recueillies par un autre que moi. Mais auparavant, s'il plaît à Dieu, je veux publier mes livres sur le mouvement et mes autres travaux, choses tout à fait nouvelles et que je mets audessus de celles que j'ai, jusqu'à présent, données au jour

 

La présente lettre vous sera remise par le sr Ruberto Galileo, mon parent et seigneur, à qui vous pourrez faire part de ce qu'elle contient, car je lui écris, sans doute, mais bien rarement. J'ai aussi des lettres du sr de Peiresc, d'Aix, que j'ai reçues en même temps que celles du sr Gassendi; et comme tous deux me demandent des verres de télescope pour faire des observations célestes, faites-moi la grâce de demander au sr Gasscndi, qui a reçu les verres, d'en informer le sr de Pcircsc; dites-lui aussi qu'il veuille bien avoir pour agréable que le sr de Peiresc puisse s'en servir et priez le enfin de présenter mes excuses à ce dernier pour mon retard à répondre à sa très obligeante lettre : mes ennuis sont tels qu'ils me forcent parfois à manquer aux devoirs que je serais le plus désireux de remplir. Je suis las et j'ai plus que suffisamment importuné V. S. Pardonnez-moi et disposez de moi. Je vous baise les mains. 

 

De la villa d'Arcetri, le 25 juillet 1634. 

 

De V. S. Ill-e,

le très dévoué et très obligé serviteur,

Galileo Galilei

 

 

DE GIOVANNI MUZZARELLI À FRANCESCO BARBERINI À ROME. FLORENCE, 13 FÉVRIER 1638 -

Pour donner pleinement satisfaction à l'ordre de Notre Sainteté, je me suis rendu à l'improviste, avec un ami médecin étranger, évaluer l'état de Galilée dans sa villa d'Arcetri, non pas tellement pour faire un rapport sur ses indispositions que pour approcher et observer les études auxquelles il s'applique et les conversations qu'il tient pour voir à quel point il pourrait répandre son opinion damnée relative au mouvement de la Terre, à force de réunions et de discours lors d'un éventuel retour à Florence. 

 

Je l'ai trouvé privé de la vue, complètement aveugle et bien qu'il espère guérir, puisqu'il ne souffre de la cataracte que depuis six mois, je me dis qu'âgé de 75 ans dpeuis peu, il est incurable. En outre, il souffre d'une grave fracture, de douleurs incessantes à la taille et de troubles du sommeil : d'après ses proches, sur vingt-quatre heures, il ne dort pas une heure entière. En somme, il est tellement mal en point qu'il ressemble plus à un cadavre qu'à un être vivant. 

 

La ville est éloignée de la ville et pas facile d'accès ce qui fait qu'il ne peut bénéficier que rarement et à grands frais de la visite du médecin. Ses recherches sont bien compromises par la cécité même si parfois il se fait lire des choses. Sa conversation se limite à se plaindre le plus souvent de ses douleurs et commenter ses infirmités auprès de ceux qui parfois lui rendent visite. D'où, pour cette raison, je pense que si Votre Sainteté faisait preuve de pitié envers lui en lui permettant de se rendre à Florence, il n'aurait pas l'occasion d'organiser des réunions. Et même si c'était le cas, il est tellement mortifié qu'il suffirait d'un solide avertissement pour le freiner complètement. 

Voilà tout ce que je peux dire à votre éminence. 

 

 

DE FRANCESCO BARBERINI À GIOVANNI MUZZARELLI À FLORENCE. ROME, LE 6 MARS 1638 -

 

La Sainteté de Notre Seigneur, avec l'avis de mes éminents collègues, a permis de permettre à Galileo Galilei de se faire transporter, de la villa d'Arcetri, où il était maintenu, à sa maison à Florence afin de se faire soigner des maux dont il souffre. Sa béatitude ordonne cependant qu'il ne quitte pas sa maison et qu'il n'admette pas chez lui d'hommes avec qu'il pourrait donner libre cours à des discours sur son opinion damnée du mouvement de la Terre, lors de discussions publiques ou secrètes. Sous peine de graves punitions, sa Sainteté lui interdit particulièrement qu'il n'engage la conversation sur cette matière. Veuillez faire en sorte qu'il observe ce qui lui est imposé par la Béatitude et les éminents collègues. Dieu vous garde. 

 

 

DE GIOVANNI MUZZARELLI À FRANCESCO BARBERINI À ROME. FLORENCE, LE 20 MARS 1638 -

 

J'ai fait part à Galileo Galilei de la grâce accordée par Sa Sainteté et la Congrégation sacrée par laquelle il pouvait se faire transporter de sa villa d'Arcetri à sa maison à Florence afin de se soigner de ses indispositions. Je lui ai donné l'injonction de ne pas quitter la ville et, sous peine d'emprisonnement à vie et d'excommunion "latae sententiae ", réservée à Sa Béatitude, de n'engager la conversation avec quiconque sur le mouvement de la Terre. 

 

A l'âge de 76 ans, il se retrouve très mortifié par la cécité et par de nombreuses autres indispositions et accidents sinistres qui le tourmentent à tel point que l'on peut croire qu'il ne désobéira pas aux ordres qui lui ont été donnés, comme il l'a promis. De plus, sa maison est à l'écart des habitations, l'un des points les plus éloignés de la ville. En outre, il a un fils sage et posé qui l'assiste continuellement. Ce fils est prévenu : il ne doit admettre en aucune façon des personnes suspectes à parler avec son père et il doit veiller à ce que les visiteurs éventuels ne s'attardent pas dans la maison. Je suis sûr qu'il y veillera et qu'il observera les ordres à la lettre car il est très obligé de la grâce faite à son père par Notre Seigneur et Son Eminence de pouvoir rester en ville pour se soigner et il crain dès lors tout ce qui pourrait révoquer cette décision. Il a d'ailleurs tout intérêt à ce que son père se soigne et vive longtemps car, à la mort de celuitci, les mille écus ne seraient plus versés chaque année par le Grand Duc. 

 

Je serai vigilant comme il se doit afin que les injonctions imposées par Sa Béatitude et Votre Eminence soient respectées. J'ajouterai que Galilée souhaiterait se faire transporter les jours de fête, pour autant que ses indispositions le lui permettent, dans une petite église à 20 pas de sa maison pour y entendre la messe. Il m'a demandé de vous supplier, ce que je fais humblement, Votre Eminence. Je m'incline et embrasse le base de votre habit. 

 


DE GALILÉE À BENEDETTO CASTELLI À ROME. ARCETRI, LE 16 AVRIL 1640 -

 

Comme vous m'en aviez donné l'espoir, je m'attendais à recevoir vos dernières spéculations sur vos nouvelles méditations et particulièrement sur l'origine des sources et des fleuves : dans des endroits élevés se forment des lagunes qui se déchargent en flux d'eau et dans les lacs situés plus bas de plus petites rivières se dispersent. "Quomodocumque hoc sit ", pour ce qu'il me reste de facultés spéculatives, j'affirme ne pas connaître de plus vif plaisir que clair que me procurent les méditations de votre Seigneurie. De votre esprit naissent des fruits très appréciés et non pas des feuillez sans importance comme celles d'une plante stérile qui ne porte pas de fruits. Si vous n'avez pas totalement abandonné nos anciennes méditations, faites-moi part de vos réflexions philosophiques. Quant à moi, rendu impotent par l'âge avancé et plus encore par la cécité, le manque de mémoire et les défaillances des autres sens, je vois s'écouler mes jours stériles, interminables et oisifs, le peu de jours qui me restent par rapport aux mois et aux années écoulées. Il me reste pour unique consolation le souvenir des amitiés passées, peu nombreuses maintenant, même si l'une d'elles par-dessus toutes me reste, la vpôtre très respectable. 

 

 

DE GALILÉE À BENEDETTO CASTELLI À ROME. ARCETRI, LE 28 AOÛT 1640 -

 

La première observation que je fis de Saturne me montra trois étoiles rondes disposées en ligne droite du couchant au levant, celle du milieu plus grande que les 2 latérales: c'est ainsi que je le vis pendant plusieurs mois et, ayant cessé de l'observer pendant plusieurs mois, je recommençai et le trouvai seul, c'est-à-dire uniquement la grande étoile du milieu. 

Etonné, je me demandais le pourquoi d'un tel changement. J'eus l'audace de me dire que 5 ou 6 mois plus tard, au moment du solstice d'été, les deux petites étoiles seraient réapparues. C'est ce qui arriva et on les vit ensuite pendant longtemps. Ensuite, ayant de nouveau interrompu mes observations pendant que Saturne éait sous les rayons du soleil, je recommençai à le regarder et je le vis avec deux mitres au lieu des étoiles rondes, ce qui lui donnait un aspect d'olive. On voyait cependant, de façon assez distincte, la boule du milieu et deux taches très sombres, placées au milieu des points d'attaches des mitres, ou, dirons-nous, oreilles. C'est ainsi qu'on a pu l'observer pendant de nombreuses années. Et maintenant, comme Votre Seigneurie me l'écrit, on voit les mitres transformées en petits globes ronds, comme me le confirment également certains de mes amis. Il se pourrait que depuis les 3 années où je n'ai pas pu l'observer, Saturne soit de nouveau resté solitaire et qu'ensuite, il soit revenu au premier stade, comme je l'observai la première fois. A l'avenir d'autres devront faire les observations, notant la durée des changements. On trouvera les périodes pour autant que des personnes aient la curiosité de faire ce que j'ai fait si longtemps, ne sachant rien faire de mieux. 

Je m'estime plus que je ne l'ai fait jusqu'ici, grâce à l'écoute que m'a accordée Monseigneur Cesarini. L'illustre Mr Virginio et toute sa maison, pleine de vertus, m'a voué une grande admiration. Je voudrais rendre les grâces qui lui sont dues à Sa Sainteté pour son affection bienveillante envers moi mais je ne saurais trouver les paroles dignes pour ce faire. Faites-le pour moi de vive voix, en lui offrant tout ce qui reste de mes faibles forces, c'est-à-dire pas grand'chose.

Votre Seigneurie nous a tous maintenus dans l'espoir et la crainte, patrons, amis et serviteurs, et il en est encore ainsi. Si vous ne venez pas pour longtemps, venez au moins pour qu'on jouisse de votre présence quelques jours. Il serait bon que le passage de la dernière lettre que vous avez écrite à Mr Guerrini ne s'en aille pas en fumée comme l'autre où vous disiez que vous vouliez accomplir votre désir de venir ici. De grâce, ne vous faites pas taxer d'inconstance et de manquement à la parole donnée. 

A défaut de votre présence, c'est le révéend Père Vincenzo Renici, Gênois, mon grand ami, qui a été envoyé à la conférence de mathématique à Pise. Il continue comme vous les observations de Jupiter et, comme je lui ai transmis un très grand nombre d'observations faites par moi pendant de nombreuses années, il a le moyen de mener à bien des calculs soir après soir. 

 

Il me plaît beaucoup que mes chers amis fassent ce que je n'ai pas pu terminer. J'embrasse vos mains et vous remets mes souhaits de bonheur. 

 

Ci-après un témoignage des attitudes impitoyables du vatican: Le cardinal Barberini donne instruction à l'inquisiteur de Florence de faire passer aux oreilles du Granduc, qu'il ne plaît pas au pape d'ériger des mausolés pour le cadavre de celui qui a été puni par le tribunal de la sainte inquisition et qui est mort pendant qu'a duré la punition. Les bons pourraient se sentir scandalisés. 

 

 

NOTE DE BAS DE PAGE 2

 

1.  Cardinale Barberino: Francesco Barberini, neveu de Urbain VIII. La tombe. 

     Mais même après la mort le pape ne pardonna pas : il empêcha qu'un mausolée en Sainte Croix soit érigé à Galilée. Le Cardinal écrivait à l'Inquisiteur de Florence en date au 25 janvier 1642 : "La lettre de Votre Seigneurie a été lue devant Sa Sainteté, lettre dans laquelle on annonçait la mort de Galileo Galilei et où l'on faisait des suggestions sur sa sépulture et les obsèques. Sa Sainteté, avec l'avis des Eminents cardinaux, a décidé que vous, avec votre tact habituel, vous glissiez au Grand Duc qu'il n'est pas bien de construire des mausolées au cadavre de celui qui a été puni par le Tribunal de la Sainte Inquisition et est mort alors que durait la punition. Les Bons pourraient se sentir scandalisés. 


4. Le père Grienberger a toujours été l'ami de Galilée. La participation des Jésuites au procès est confirmée à plusieurs reprises. Peut-être les paroles de Grienberger pourraient-elles être interprétées de façon plus bienveillante : une bonne partie des Jésuites, chercheurs en astronomie (ils n'étaient pas hostiles à l'idée du mouvement de la Terre) auraient pu intervenir avec le poids de leur autorité et éviter l'inculpation de Galilée. 


Ce dernier argument est faible: Il était avancé aussi par les scientifiques / amis de Galilei, les Lincei, à Rome. Il montre à mon avis à quel point ils ont mal jugé la situation, même le Père Grienberger. 

 

Le Père Grassi, selon le témoignage de sa lettre citée plus haut, a essayé, sur demande, " par tous les moyens d'apaiser les esprits irrités (inaspriti) contre lui (Galilei), et de les rendre capables de comprendre l'efficacité des arguments apportés par lui (Galilei)". 

Grassi était le chef des mathématiciens au Collegio romano, donc il y aurait pu avoir du poids. Mais les theologues non-mathématiciens à Rome ne s'y interessaient pas. 

 

Galilei était encore à Rome en 1624, fut reçu à plusieures reprisespar le pape et plusieurs cardinaux, discutait pendant de longues heures avec eux, ce qui a dû le flatter de maniére considérable. Il avait perdu de sa mémoire la criticalité et les détails de l'exhortation de 1616, il a sousestimé les forces de l'appareil de l'inquisition, des cardinaux rattachés directement au pape, il a surestimé sa force de faire bouger la pensée des théologues. De tels systèmes immobiles, de lourdeurs administratives, procédu-rales, où le temps ne semble jouer aucun rôle, de tels systèmes: on ne les change que de l'intérieur, pas de l'extérieur. 

 

Sur un plan tactique, Galilei était naïf, cholérique parfois, parfois même un raleur non-diplomatique. Avec les jésuites du Collegio romano il aurait dû être facile de soigner des contacts pour Galilei, il y avait des amis (le Père Clavio, qui avait participé au travaux de la réforme grégorienne du calendrier, il a du avoir un jugement de première compétence su Copernicus); et quand Bellarmino consulta les scientifiques du Collegio romano en 1611, ils étaient très corrects. 

 

Galilei était dans les mains de théologues non-mathématiciens, des gardiens de la vérité catholique, mais les mathématiciens du Collegio romano n'y faisait pas partie, malgré le manque de culture scientifique et humaine de Galilei à leur égard. 

 

Le cas de Galilei:

 

Un jeu macchiavellique de nains inventifs qui ont mobilisé leur raison instrumentale afin de défendre leur pouvoir. 

 

Comme étude d'encadrement historique, je me suis servi d'une source allemande / autrichienne, dont je voudrais citer ci-après un passage, reflétant une position de l'historiographie professionnelle à l'égard des tensions multiples entre religion, science et structures de dominance politique.

 

Heinrich LUTZ, professeur ordinaire d'histoire moderne, Université de Vienne


 

APERÇU DE L'HISTOIRE D'OLDENBOURG: (OGG 10) RÉFORME ET CONTRE-RÉFORME, PAGE 172, 3E ÉDITION 1991, MUNICH)

 

Le processus fondamental de l'ainsi-dite "Verwissenschaflichung" (W. Schäfer: littéralement de la "scientification", c. à d. aborder tous les problèmes et leurs analyses par une optique scientifique), et il faut mettre en garde contre son insertion non-différenciéedans le modèle de Max Weber de la rationalisation occidentale, pose une série de questions, dont l'histoire de la science ne s'est pas encore occupée suffisamment bien. En ce qui concerne la comparaison entre protestantisme et catholicisme, le cas de Galilei mérite, jusqu'à nos jours et à juste titre, une attention particulière. La thèse héliocentrique de Copernicus, qui avait dédié son oeuvre principal au Pape Paul III., se heurta à une opposition du coté de tous les camps confessionnels (pour des raisons théologiques et / ou sociales-conservatrices, comme p. ex. Melanchthon). Avec la réforme du calendrier du Pape Grégor XIII. (1582, pas 1583) le coté catholique a démontré de la modernité scientifique - bien sur nouée à des revendications d'autorité ecclésiastique -, niée pour un certain temps par le protestantisme. 

 

Qu'en 1616 les thèses de Copernicus furent condamnées par Rome et qu'en 1633 Galilei eût dû se soumettre à une interdiction humiliante de publication, signifie beaucoup plus (voir l'esquisse de problème G. LUTZ, 1976, et l'analyse des dossiers du procès / PAGANO, 1984). Si la force monolithique du catholicisme post-tridentien a été mobilisée de cette manière anxieuse-brutale contre le progrès scientifique, les conséquences négatives pour le système responsable pour ce jugement ne pouvaient pas manquer. D'ailleurs le pluralisme intra-protestant, et à perspectives plus long-terme, était bénéfique à la liberté de la discussion scientifique aussi bien que la reflexion critique sur la Bible. 

Tout compte fait, les rapports de tensions multi-couches entre religion, science et les structures de dominance politique, dans la phase tardive de l'unité de culture écclésiastique, représentent encore aujourd'hui un domaine de recherche à beaucoup d'inconnus. Les mots-clef rationalisationet Verwissenschaftlichung, en tant que tels, n'offrent pas encore une entrée fiable, car tous les deux partent trop d'une norme établie a posteriori.

 

La même critique vaut pour le terme sécularisation; ce n'est que par une analyse soignée des poussées, nuancées sur un plan temporel que régional, de rethéologisation et de déthéologisation, que ce cadre élargi de l'histoire de la science du début de l'époque moderne pourrait être rempli.

 

 

CONCLUSION

 

La science et la religion ont une motivation comparable:

 

Comprendre les faits de l'univers, le monde en nous, le monde autour de nous, optimiser ces mondes exterieur et interieur, en d'autres termes:

 

Ameliorer l'etat de la condition humaine. Mais les methodes et les resultats sont peu ou pas compatibles. Il y a conflit entre la verite probable mais en general bien fiable de la science et les verites absolues des theologiens. Ce conflit persiste. Galilei, ce n'est pas la gloire de la theologie catholique. 

 

Jusqu'a preuve du contraire ce sont les physiciens, accuses par le marxisme tardif d'etre des nains inventifs irresponsables, qui ont cherche le plus valablement apres les forces fondamentales oeuvrant les faits de l'univers. Ils en ont trouvé quatre, et ceci par un travail derigueur critique et honnete, que deja kant* recommanda au theologues, entre autres, comme source d'inspiration afin de trouver une base plus solide pour la fondation de leurs inventions. 

 

Aujourd'hui il aurait certainement adresse la meme recommandation aux marxistes tardifs (horkheimer) qui accablent les physiciens de reproches d'irresponsabilite et de raison instrumentale.

 

*Immanuel KANT, Kritik der reinen Vernunft, Felix Meiner, Hamburg, 1976, P. 7. 

 

 

CHRONOLOGIE      

 

                                                Naissance                                                     Mort

Nicolaus COPERNICUS

19-02-1473

Thorn

24-05-1543

Fromborg

Tycho BRAHE

14-12-1546

Knudstup/Schonen

24-10-1601

Prag

Galileo GALILEI

15-02-1564

Pisa

08-01-1642

Arcetri

Johannes KEPLER

27-12-1571

Weil der Stadt

15-11-1630

Regensburg

Isaac NEWTON

04-01-1643

Woolsthorpe

31-03-1727

Kensington

 

Considérations personnelles à l'égard du cas de Galilei :

Les dilemnes et les espoirs

• Il y a conflit entre la verite probable de la science et verites absolues des theologiens.

• Il y a mefiance entre les sciences naturelles et sciences humaines (theologie, philosophie, sociologie).

• Il y a raison d'essayer d'abord à savoir (plus intensif en travail) que de croire (moins intensif en travail).

• Il est irresponsable de pousser à la foi la ou il y a un savoir plus fiable.

• Dans le camp des sciences humaines la comprehension des faits de l'univers est assez miserable.

• Dans le camp des sciences le savoir des scientifiques est assez specialise. Les forces pour integrer ce savoir des specialistes sont assez faibles et insuffisantes.

• La culture est assez schizophrene et souvent divisee en opinions fondees sans rigueur critique (cartesiennes en systemes fermes).

• Il y a commerce economique considerable avec l'ignorance des citoyens (non seulement en astrologie, occultisme, sectes etc., mais aussi en religions / théologies).

• Beaucoup de postulats theologiques ne valent pas plus que les idees farfelues des astrologues.

• L'irresponsabilitee, la raison instrumentale et l'absence de critique ideologique sont plus nombreuses dans le camp des sciences humaines que dans le camp de la science. 

 

Regles pour se faire une image du monde plus fiable (weltanschauung):


1) Pour commencer il faudrait etre sceptique et critique a l'égard de beaucoup de termes de pensée traditionnels, notemment:

• Le matériel (materialisme)

• L'immatériel (idéalisme, la transcendance etc.)


Les deux sont intimement identiques au niveau du microcosme (mécanique quantique).

2) Il est recommande de passer par le savoir de la science avant de passer par les ideologies (méfiez-vous des vérités absolues), meme si cette recommandation se heurte au reproche acharne de "scientisme" de l'autre camp.

3) C'est dans le microcosme que s'articulent les lois qui oeuvrent les faits de l'univers:

• La psychologie est beaucoup moins immatérielle que font croire les théologiens ou les philosophes

• Les larmes quand on est triste, le travail des muscles faciales quand on rit

• Il faut de l'énergie quand on pense, quand on sent, quand on agit, quand on aime (adenosine triphosphate/ ATP: biochimie)

• Il faut un substrat a haute organisation biologique afin d'assurer l'existence du Saint Esprit (penser, agir), si non il ne fait rien

• Le Christ était un être humain, a génome diploïde, moitié maman physique, moitié papa physique, généré par un processus conforme à la création depuis plusieurs centaines de millions d'années et assurant -depuis un demi-million d'années environ - un plaisir humain tres profond

• La mécanique quantique moderne exclut une origine de l'univers avec perspective "création selon plan téléologique"

• Les faits de l'univers sont le résultat d'un jeu ouvert des quatre forces fondamentales des physiciens, une création qui se crée elle-même

• S'il y a dieu, il faudrait plutôt le chercher derrière les forces fondamentales unifiées que dans les idées de théologiens ignorants et irresponsables

• Intéressez-vous à la psychologie physiologique, à la mécanique quantique, à la biochimie de la vision, de l'amour, de la pensée, à la plasticité des synapses (mémoire, idées)

• Toute la matière physique de la terre, condensée à la densité d'un trou noir, passe par une alliance de la main; la matière est donc assez immatérielle, elle n'est pas la saleté de la création. Elle est très belle. Le matériel de la terre est une petite bille, le reste du globe étant immatériel!

• Dans l'univers actuel, les physiciens n'ont pas trouvé de force(s) capable(s) d'oeuvrer la ressurection en chair et en os. Votre vie est unique et sa fin irréversible. Elle ne continuera qu'en vos enfants, si vous en avez

• Le bonheur: à trouver dans l'univers tel qu'il est, ensemble avec les êtres humains autour de vous, tenant compte de la singularité et de l'irréversibilité de votre vie

• Le paradis: la communication interhumaine ouverte, sans préjudice et sans sens unique

• Mais: méfiez-vous des mataiologues de Copernicus, méfiez-vous de termes comme "éternel", "jamais", "toujours", des totalisateurs logiques, signes de vérités absolues

• Prenez tout ceci comme vérités probables; je n'y insiste pas si vos arguments sont meilleurs et de rigueur critique et honnête, profitant de la force émancipatrice de la science, sans la mépriser à l'exemple du cas de Galilei.


Societe Dante Alighieri, 6 Fevrier 1996